4 juillet 2020

Du Pape François



Prions-nous les uns pour les autres ?




Nous célébrons ensemble deux figures très différentes. Pierre était un pêcheur qui passait ses journées entre les rames et les filets, Paul un pharisien cultivé qui enseignait dans les synagogues. Lorsqu’ils partent en mission, Pierre s’adresse aux juifs, Paul aux païens, et quand leurs chemins se croisent, ils discutent de façon vive, comme Paul n’a pas honte de le raconter dans l’une de ses lettres (cf. Ga 2, 11...). Ils étaient donc deux personnes très différentes, mais ils se sentaient frères, comme dans une famille unie où l’on discute souvent, mais où on s’aime toujours. Cependant la proximité qu’ils avaient ne provenait pas des inclinations naturelles, mais du Seigneur - il ne nous a pas demandé de nous plaire, mais de nous aimer. C’est le Seigneur qui nous unit, sans nous uniformiser, et il nous unit dans nos différences.
La première lecture d’aujourd’hui nous porte à la source de cette unité. Elle raconte que l’Église, à peine née, traverse une phase critique : Hérode est furieux, la persécution est violente, et l’Apôtre Jacques a été tué. Maintenant, Pierre lui-même est arrêté. La communauté semble décapitée et chacun craint pour sa propre vie. Pourtant, en ce moment tragique, personne ne s’enfuit, personne ne pense à sauver sa peau, personne n’abandonne les autres, mais tous prient ensemble. Dans la prière ils puisent le courage, de la prière vient une unité plus forte que toute menace. Le texte dit que « tandis que Pierre était ainsi détenu dans la prison, l’Église priait Dieu pour lui avec insistance » (Ac 12, 5). L’unité est un principe qui s’active par la prière, parce que la prière permet à l’Esprit Saint d’intervenir, d’ouvrir à l’espérance, de réduire les distances, de rester ensemble dans les difficultés.
Remarquons-le aussi : dans ces circonstances dramatiques, personne ne se lamente du mal, des persécutions, ou d’Hérode - personne n’insulte Hérode ! Nous, nous sommes tellement habitués à insulter les responsables… C’est inutile et fastidieux que les chrétiens perdent leur temps à se lamenter sur monde, sur la société, et sur ce qui ne va pas. Les lamentations ne changent rien. Rappelons-nous que les lamentations sont la deuxième porte fermée à l’Esprit Saint : la première est le narcissisme qui t’amène au miroir, à te regarder continuellement. La deuxième, c’est le découragement qui t’amène aux lamentations. La troisième le pessimisme qui te plonge dans le noir, dans l’obscurité. Ces trois attitudes ferment la porte à l’Esprit Saint.
Ces chrétiens n’accusaient pas, mais ils priaient. Dans cette communauté, personne ne disait : Si Pierre avait été plus prudent, nous ne serions pas dans cette situation. Personne. Pierre, humainement, avait des raisons d’être critiqué, mais personne ne le critiquait. Non, ils ne parlaient pas mal de lui, mais ils priaient pour lui. Ils ne parlaient pas dans le dos, mais parlaient à Dieu. Et nous aujourd’hui, nous pouvons nous demander : Gardons-nous notre unité, l’unité de l’Église, par la prière ? Prions-nous les uns pour les autres ?
Ce qui arriverait si on priait beaucoup plus et si on murmurait beaucoup moins, la langue un peu moins agitée, c’est ce qui est arrivé à Pierre en prison. Comme à cette époque, de nombreuses portes qui séparent s’ouvriraient, des chaînes qui paralysent tomberaient, et nous serions étonnés comme cette fille qui, en voyant Pierre à la porte, ne réussit pas à ouvrir, mais court à l’intérieur, émerveillée de joie de voir Pierre (cf. Ac 12, 10-17).
Demandons la grâce de savoir prier les uns pour les autres. Saint Paul exhortait les chrétiens à prier pour tous et en premier lieu pour ceux qui gouvernent (cf 1 Tm 2, 1-3). “Mais ce dirigeant est …”, disons-nous - et je ne citerai pas les qualificatifs que nous leur attribuons… Que Dieu les juge, mais nous, prions pour les dirigeants ! Prions : ils ont besoin de la prière, et c’est un devoir que le Seigneur nous confie.
Le faisons-nous ? Ou bien parlons-nous, insultons-nous, et ça s’arrête là ? Dieu attend que quand nous prions, nous nous souvenions aussi de celui qui ne pense pas comme nous, de celui qui nous a fermé la porte au nez, de celui à qui nous avons de la peine à pardonner. Seule la prière défait les chaînes, comme pour Pierre. Seule la prière aplanit la voie vers l’unité.

Homélie de la messe du 29 juin 2020




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