4 décembre 2021

Du Pape François

 Avec toi, Jésus, je suis roi


Chers jeunes, deux images, tirées de la Parole de Dieu que nous venons d’entendre, nous aident à nous approcher de Jésus, Roi de l’Univers. La première, issue de l’Apocalypse de saint Jean, et anticipée par le prophète Daniel dans la première lecture, est décrite par les mots : « Voici qu’il vient avec les nuées » (Ap 1,7 ; Dn 7,13). C’est une référence à la venue glorieuse de Jésus comme Seigneur et fin de l’histoire. La deuxième image est celle de l’Évangile : le Christ se tient devant Pilate et lui dit : « Je suis roi » (Jn 18,37). Cela nous fait du bien, chers jeunes, de nous arrêter et de contempler ces images de Jésus, alors que nous commençons le chemin vers les Journées mondiales de la jeunesse 2023 à Lisbonne.

Attardons-nous donc sur la première : Jésus qui vient avec les nuées. C’est une image qui parle de la venue du Christ en gloire à la fin des temps. Elle nous fait prendre conscience que le dernier mot sur notre existence viendra de Jésus, pas de nous. Il est - poursuit l’Écriture - celui qui « chevauche les nuées » (Ps 68, 5) et qui, dans les cieux, manifeste sa puissance : il est le Seigneur, le Seigneur qui vient d’en haut et ne disparaîtra jamais, il est celui qui résiste à tout ce qui passe, il est notre inébranlable et éternelle confiance. Il est le Seigneur. Cette prophétie d’espérance illumine nos nuits. Elle nous dit que Dieu vient, que Dieu est présent, que Dieu est à l’œuvre et que Dieu oriente l’histoire vers lui : vers le bien. Il vient « avec les nuées » pour nous rassurer, comme pour dire : Je ne vous laisse pas seuls quand votre vie est enveloppée de sombres nuages. Je suis toujours avec vous. Je viens apporter la lumière et ramener la sérénité.

Le prophète Daniel précise cependant qu’il a vu le Seigneur venir avec les nuées « au cours des visions de la nuit » (Dn 7,13). Les visions de la nuit : Dieu vient dans la nuit, parmi les nuages souvent sombres qui s’amoncellent sur nos vies. Chacun de nous connaît ces moments. Il faut le reconnaître, et regarder au-delà de la nuit, élever notre regard pour le voir dans l’obscurité.

Chers jeunes, regarder les visions de la nuit, qu’est-ce que cela veut dire ? Avoir un regard lumineux même dans les ténèbres, ne pas cesser de chercher la lumière au milieu de l’obscurité que souvent nous portons dans notre cœur et que nous voyons autour de nous. Élever le regard de la terre vers le haut, non pas pour fuir, mais pour vaincre la tentation de rester sur le sol de nos peurs. Voilà le danger : que nos peurs nous commandent, que nous restions enfermés dans nos pensées en pleurant sur notre sort.

Lève les yeux, lève-toi ! Voilà l’invitation : Lève les yeux, lève-toi ! C’est l’invitation que le Seigneur nous adresse et dont j’ai voulu me faire l’écho dans le Message qui vous est dédié, chers jeunes, pour accompagner le chemin de cette année. C’est la tâche la plus ardue mais la tâche la plus fascinante qui vous ait été confiée : vous tenir debout quand tout semble s’écrouler. Être des sentinelles capables de voir la lumière au cours des visions de la nuit, être des bâtisseurs au milieu des décombres - il y en a tellement dans ce monde aujourd’hui ! Allumer une flamme, une lumière d’espoir qui annonce le lendemain, être vif et regarder l’avenir avec courage.

Nous en arrivons à la deuxième image, celle de Jésus disant à Pilate : « Je suis roi ». Sa détermination, son courage, sa liberté suprême sont frappants. Il a été arrêté, il est emmené au prétoire, il est interrogé par ceux qui peuvent le condamner à mort. Dans une telle circonstance, il aurait pu mettre en avant un droit naturel à se défendre, peut-être en essayant “d’ajuster les choses“, en trouvant un compromis. Au contraire, Jésus ne cache pas son identité, il ne déguise pas ses intentions, il ne profite pas de la porte de sortie que même Pilate avait pourtant laissée ouverte. Non, il n’en profite pas.

Avec le courage de la vérité, il répond : « Je suis roi ». Il prend la responsabilité de sa propre vie : je suis venu pour une mission, et je vais jusqu’au bout pour témoigner du Royaume du Père. Il dit : « Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité » (Jn 18,37). Jésus est ainsi. Il est venu sans duplicité, pour proclamer par sa vie que son Royaume est différent des autres royaumes du monde, que Dieu ne règne pas pour accroître son pouvoir et écraser les autres, il ne règne pas avec des armées et par la force. Son Royaume est le Royaume de l’amour : « Je suis roi », mais de ce Royaume d’amour. « Je suis roi » du Royaume de ceux qui donnent leur vie pour le salut des autres.

Chers jeunes, la liberté de Jésus attire ! Laissons-la vibrer en nous, qu’elle nous secoue, qu’elle suscite en nous le courage de la vérité. Et nous pouvons nous demander : Si j’étais ici, maintenant, à la place de Pilate, face à Jésus, en le regardant dans les yeux, de quoi aurais-je honte ? Face à la vérité de Jésus, à la vérité qui est Jésus, quelles sont mes faussetés qui ne tiennent pas, mes duplicités qui ne lui plaisent pas ? Chacun de nous en a, cherchons-les. Nous avons tous de ces duplicités, de ces compromis, de cette manière d’“arranger les choses” pour que la croix s’éloigne.

Nous avons besoin de nous mettre devant Jésus pour faire la vérité en nous. Nous avons besoin de l’adorer pour être libres intérieurement, pour éclairer notre vie et ne pas nous laisser tromper par les modes du moment, par les feux d’artifice de la consommation qui éblouissent et paralysent. Chers amis, nous ne sommes pas ici pour nous laisser séduire par les sirènes du monde, mais pour prendre notre vie en main, pour mordre à pleine dents dans la vie, pour la vivre pleinement !

Ainsi, dans la liberté de Jésus, nous trouvons aussi le courage d’aller à contre-courant. Et c’est un mot que je voudrais souligner : aller à contre-courant, avoir le courage d’aller à contre-courant - non pas contre quelqu’un, et c’est la tentation de tous les jours, comme le font les victimistes et les complotistes qui rejettent toujours la faute sur les autres. Non. Contre le courant malsain de notre moi égoïste, fermé et rigide, qui très souvent cherche des moyens pour survivre. Alors non, pas ça ! Aller à contre-courant pour nous mettre sur les pas de Jésus. Il nous apprend à aller contre le mal avec la seule force humble et douce du bien. Sans raccourcis, sans mensonges, sans duplicités.

Notre monde, blessé par tellement de maux, n’a pas besoin de compromis ambigus, de personnes qui vont de-ci de-là comme les vagues de la mer, où le vent les porte, où leurs propres intérêts les portent, de personnes qui vont un peu à droite, puis un peu à gauche, après avoir flairé ce qui convient - les “équilibristes” ! Un chrétien qui fait ainsi ressemble plus à un équilibriste qu’à un chrétien. Les équilibristes qui cherchent toujours une manière de ne pas se salir les mains, de ne pas engager leur vie, de ne pas se mettre en jeu sérieusement.  S’il vous plaît, ayez peur de devenir de jeunes équilibristes.

Soyez libres, soyez authentiques, soyez la conscience critique de la société. Soyez libres dans la critique. Ayez la passion de la vérité, pour que vous puissiez dire : Ma vie n’est pas esclave des logiques de ce monde car je règne avec Jésus pour la justice, pour l’amour et la paix !

Chers jeunes, je souhaite que chacun d’entre vous puisse ressentir la joie de dire : « Avec Jésus, moi aussi je suis roi ». Je suis roi : je suis un signe vivant de l’amour de Dieu, de sa compassion et de sa tendresse. Je suis ébloui par la lumière de l’Évangile, et j’attends avec impatience les visions de la nuit. Et quand je tombe, je retrouve en Jésus le courage de me relever, de me battre et d’espérer à nouveau - à tous les âges de la vie.


Homélie de la messe du Christ Roi dimanche 21 novembre 2021,

Journée mondiale de la jeunesse en préparation des JMJ de Lisbonne en 2023


 


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