22 avril 2023

Du Pape François

 La paix soit avec vous !

 

 Aujourd’hui, le Seigneur ressuscité apparaît aux disciples qui l’avaient abandonné, et il leur offre sa miséricorde en montrant ses plaies. Les paroles qu’il leur adresse sont rythmées par une salutation qui apparaît trois fois de suite dans l’Évangile d’aujourd’hui : « La paix soit avec vous ! » (Jn 20, 19.21.26). La paix soit avec vous ! C’est la salutation du Ressuscité, qui vient à la rencontre de toute faiblesse et de toute erreur humaine. Suivons donc les trois la paix soit avec vous de Jésus : nous y découvrirons trois actions de la miséricorde divine en nous. Celle-ci donne avant tout la joie ; ensuite elle suscite le pardon ; enfin elle console dans la peine.

1. En premier lieu, la miséricorde de Dieu donne la joie, une joie spéciale, la joie de se sentir pardonné gratuitement. Quand le soir de Pâques, les disciples voient Jésus et l’entendent pour la première fois leur dire la paix soit avec vous ! ils sont remplis de joie. Ils s’étaient enfermés dans la maison par crainte, mais ils étaient aussi enfermés en eux-mêmes, abattus par un sentiment d’échec : ils étaient des disciples qui avaient abandonné le Maître. Au moment de son arrestation, ils s’étaient enfuis. Pierre l’avait même renié trois fois, et un de leur groupe – oui, l’un d’entre eux vraiment - avait été le traître. Il y avait bien des raisons de se sentir non seulement effrayé, mais raté, vaurien. Par le passé, ils avaient certes fait des choix courageux, ils avaient suivi le Maître avec enthousiasme, engagement, et générosité, mais à la fin tout s’était effondré : la peur avait prévalu.

C’est dans ce climat que survient le premier la paix soit avec vous ! Les disciples auraient dû éprouver de la honte, mais au contraire, ils se réjouissent. Pourquoi ? Parce que ce visage, cette salutation, ces paroles déplacent leur attention d’eux-mêmes vers Jésus. En effet, « les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur » : ils sont détournés d’eux-mêmes et de leurs propres échecs, et ils sont attirés par son regard, où ne se trouve aucune sévérité, mais la miséricorde. Le Christ ne les réprouve pas pour le passé, mais il leur donne sa bienveillance, et cela les ranime, répand dans leurs cœurs la paix perdue, fait d’eux des hommes nouveaux, purifiés par un pardon donné sans calcul, un pardon donné sans mérite. Oui, la joie de Dieu est une joie qui naît du pardon, et qui laisse la paix, une joie qui relève sans humilier et cette joie nous change.

2. La paix soit avec vous ! Le Seigneur le dit une seconde fois, en ajoutant : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie », et il donne aux disciples l’Esprit Saint pour faire d’eux des artisans de réconciliation : « À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ». Non seulement ils reçoivent la miséricorde, mais ils deviennent dispensateurs de cette même miséricorde qu’ils ont reçue. Ils reçoivent ce pouvoir, non pas à cause de leurs mérites, ou de leurs études, non : c’est un pur don de grâce, mais qui repose sur leur expérience d’hommes pardonnés.

Dans l’Église, aujourd’hui et toujours, le pardon doit ainsi nous rejoindre, à travers l’humble bonté d’un confesseur miséricordieux, qui sait qu’il n’est pas le détenteur d’un pouvoir quelconque, mais un canal de miséricorde qui déverse sur les autres le pardon dont il a bénéficié le premier. Et de là vient ce pardon de tout, parce que Dieu pardonne tout, et toujours, et nous devons être des canaux de ce pardon, à travers notre expérience d'être pardonné.

« À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ». Ces paroles sont à l’origine du sacrement de la Réconciliation, mais pas seulement. Jésus a fait de toute l’Église une communauté dispensatrice de miséricorde, un signe et un instrument de réconciliation pour l’humanité.

Frères et sœurs, chacun de nous a reçu dans le Baptême l’Esprit Saint pour être homme et femme de réconciliation. Quand nous faisons l’expérience de la joie d’être libérés du poids de nos péchés, de nos échecs, quand nous savons personnellement ce que signifie renaître après une expérience qui semblait sans issue, alors il faut partager le pain de la miséricorde avec ceux qui sont à côté de nous. Sentons-nous appelés à cela. Et demandons-nous : Moi, ici où je vis, moi en famille, moi au travail, dans ma communauté, est-ce que je promeus la communion, suis-je un tisseur de réconciliation ? Est-ce que je m’engage à désamorcer les conflits, afin d’apporter le pardon là où il y a la haine, la paix là où il y a de la rancœur ? Ou est-ce que je tombe dans le monde du bavardage qui tue toujours ? Jésus cherche, en nous, des témoins devant le monde de ces paroles : La paix soit avec vous ! J’ai reçu la paix : je la donne à l’autre.

3. Le Seigneur répète pour la troisième fois La paix soit avec vous ! quand il réapparaît huit jours plus tard aux disciples, pour confirmer la foi difficile de Thomas. Thomas veut voir et toucher, et le Seigneur ne se scandalise pas de son incrédulité. Mais il vient à sa rencontre : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ». Ce ne sont pas des paroles de défi, mais de miséricorde. Jésus comprend la difficulté de Thomas. Il ne le traite pas avec dureté, et l’apôtre est secoué au-dedans de lui-même par tant de bienveillance. Et c’est ainsi que d’incroyant, il devient croyant, et il fait la confession de foi la plus simple et la plus belle : « Mon Seigneur et mon Dieu ! ». C’est une belle invocation, nous pouvons la faire nôtre et la répéter au cours de notre journée, surtout lorsque nous faisons l’expérience de doutes et d’obscurité, comme Thomas.

En Thomas, se trouve l’histoire de chaque croyantde chacun de nous : il y a des moments difficiles, où la vie semble démentir la foi, où nous sommes en crise, et où nous avons besoin de toucher et de voir. Mais comme Thomas, c’est précisément là que nous redécouvrons le Cœur du Seigneur, sa miséricorde. Dans ces situations, Jésus ne vient pas vers nous de manière triomphante et avec des preuves écrasantes, il n’accomplit pas de miracles éclatants, mais il offre des signes chaleureux de miséricorde. Il nous console avec le même style que celui de l’Évangile d’aujourd’hui : en nous offrant ses plaies. N’oublions pas ceci : face aux péchés, au pire péché, le nôtre ou celui des autres, il y a toujours la présence du Seigneur, qui offre ses plaies. Ne l’oublions pas. Et dans notre ministère de confesseurs, nous devons montrer aux gens que devant leurs péchés, il y a les plaies du Seigneur, qui sont plus puissantes que le péché.

Et il nous fait aussi découvrir les plaies de nos frères et sœurs. Oui, la miséricorde de Dieu, dans nos crises et dans nos peines, nous met souvent en contact avec les souffrances du prochain. Nous pensions que nous étions au sommet de la souffrance, au plus bas d’une situation difficile, et nous découvrons alors, tout en restant silencieux, qu’il y a quelqu’un qui traverse des moments, des périodes pires. Si nous prenons soin des plaies du prochain et si nous y déversons la miséricorde, une espérance nouvelle, qui console dans la peine, renaît en nous. Demandons-nous donc si ces derniers temps, nous avons touché les plaies de quelqu’un qui souffre dans son corps, ou dans son esprit, si nous avons apporté la paix à un corps blessé ou à un esprit brisé, si nous avons pris un peu de temps pour écouter, pour accompagner, pour consoler. Quand nous le faisons, nous rencontrons Jésus qui, avec des yeux de celui qui est éprouvé par la vie, nous regarde avec miséricorde et dit : La paix soit avec vous ! 

Et j’aime penser à la présence de la Vierge parmi les Apôtres, la Vierge, Mère de l’Église, Mère de la Miséricorde. Qu’elle nous aide à avancer dans notre si beau ministère de prêtre.

 

Homélie du dimanche de la Miséricorde 24 avril 2022

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