La Parole de Dieu libère la
puissance de l’Esprit Saint
Nous
venons d’entendre Jésus dire : « Venez à ma suite ». Alors
aussitôt, « laissant leurs filets, ils le suivirent » (Mc 1,
17-18). La force de la Parole de Dieu est grande. La Parole de Dieu libère la
puissance de l’Esprit Saint, elle est une force qui attire à Dieu, comme cela
arrive à ces jeunes pêcheurs, foudroyés par les paroles de Jésus. Et c’est aussi
une force qui envoie vers les autres : la Parole attire à
Dieu et envoie vers les autres, voilà son
dynamisme ! Elle ne nous laisse pas enfermés en nous-mêmes, mais elle
dilate le cœur, fait inverser la tendance, renverse les habitudes, ouvre des possibilités
nouvelles, entrouvre des horizons insoupçonnés.
Frères
et sœurs, la Parole de Dieu veut faire cela en chacun de nous. Comme pour les
premiers disciples qui, en accueillant les paroles de Jésus, ont laissé leurs
filets et commencé une aventure merveilleuse, de même sur les rivages de notre
vie, près des barques de nos familles et des réseaux du travail, la Parole suscite
l’appel de Jésus. Il nous appelle à prendre le large
avec Lui, vers les autres. Oui, la Parole suscite
la mission, elle fait de nous des messagers et des témoins de Dieu, pour
un monde qui est rempli de paroles, mais tellement assoiffé de cette Parole
qu’il ignore souvent. L’Église vit de ce dynamisme : elle est appelée par
le Christ, attirée par Lui, et elle est envoyée dans le monde pour témoigner de
Lui. C’est cela le dynamisme de l’Église.
La
Parole de Dieu touche le cœur de sa douce force, s’imprime dans l’âme, la
renouvelle avec la paix de Jésus, et nous rend attentifs aux autres. Si nous
regardons les amis de Dieu, les témoins de l’Évangile dans l’histoire, les
saints, nous voyons que pour chacun, la Parole a été décisive. Pensons au
premier moine, saint Antoine, qui, frappé par un passage de l’Évangile
lorsqu’il était à la messe, laisse tout pour le Seigneur. Pensons à saint
Augustin, dont la vie changea quand une parole divine lui guérit le cœur. Pensons
à sainte Thérèse de l’Enfant Jésus qui découvrit sa vocation en lisant les
lettres de saint Paul. Et je pense au saint dont je porte le nom, François
d’Assise qui, après avoir prié, lit dans l’Évangile que Jésus envoie ses
disciples prêcher, et s’écrie : « Cela je le veux, cela je le demande, cela je
désire le faire de tout mon
cœur ».
Ce sont des vies changées par la Parole de vie, par la Parole du Seigneur.
Mais
pourquoi n’arrive-t-il pas la même chose pour beaucoup d’entre nous ? Très
souvent lorsque nous écoutons la Parole de Dieu, elle entre d’une oreille, et
ressort de l’autre. Pourquoi ? Peut-être parce que, comme nous le montrent
ces témoins, il ne faut pas être “sourd” à la Parole. C’est notre risque :
submergés par mille paroles, nous laissons la Parole de Dieu glisser sur nous.
Nous l’entendons, mais nous ne l’écoutons pas. Nous l’écoutons, mais nous ne la
gardons pas. Nous la gardons mais nous ne nous laissons pas provoquer pour
changer. Et surtout, nous la lisons, mais nous ne la prions pas, alors que la
prière doit aller de pair avec la
lecture de la Sainte Écriture, pour que s’établisse un dialogue entre Dieu et
l’homme (cf. Dei Verbum, n.
25). N’oublions pas les deux dimensions fondatrices de la prière
chrétienne : l’écoute de la Parole et l’adoration du Seigneur. Faisons
place à la Parole de Jésus, à la Parole de Jésus priée, et il arrivera pour
nous ce qui est arrivé aux premiers disciples.
Revenons
donc à l’Évangile d’aujourd’hui, qui nous rapporte deux gestes qui résultent de
la Parole de Jésus : « Laissant leurs filets, ils le suivirent »
(Mc 1, 18). Ils laissent, et suivent.
Arrêtons-nous brièvement là-dessus.
Ils
laissent. Qu’ont-ils laissé ? La barque et les filets,
c’est-à-dire la vie qu’ils avaient menée jusqu’à ce moment. Très souvent, nous
peinons à laisser nos sécurités, nos habitudes, parce que nous restons pris en
elles comme des poissons dans un filet. Mais celui qui est en contact avec la
Parole guérit des liens du passé, parce que la Parole vivante réinterprète sa
vie, elle guérit aussi la mémoire blessée en y greffant la mémoire de Dieu et
de ses œuvres pour nous.
L’Écriture
nous établit dans le bien, elle nous rappelle qui nous sommes : des
enfants de Dieu, sauvés et aimés. « Les paroles toutes parfumées du
Seigneur » (S. François d’Assise, Lettre
aux fidèles) sont comme le miel, elles rendent la vie
savoureuse : elles nous baignent de la douceur de Dieu, elles nourrissent
l’âme, elles éloignent la peur, elles sont victorieuses de la solitude. Et de
même qu’elles ont fait que ces disciples abandonnent la répétitivité d’une vie
faite de barques et de filets, de même elles renouvellent en nous la foi, la
purifiant et la libérant de nombre de débris, la ramenant aux origines, à la
pureté naissante de l’Évangile. Avec le récit des œuvres de Dieu pour nous, la
Sainte Écriture défait les amarrages d’une foi paralysée et nous fait savourer
à nouveau la vie chrétienne, telle qu’elle est vraiment : une histoire
d’amour avec le Seigneur.
Les
disciples laissent donc, puis ils suivent :
derrière le Maitre, ils font des pas en avant. En effet sa Parole, tout en
libérant des encombrements du passé et du présent, fait mûrir dans la vérité et
dans la charité : elle ravive le cœur, l’ébranle, le purifie des
hypocrisies et le remplit d’espérance. La Bible elle-même atteste que la Parole
est concrète et efficace “comme la pluie et la neige” pour la terre (Is 55,
10-11), « comme un feu », « comme un marteau qui fracasse le
roc » (Jr 23, 29),
comme une épée tranchante qui « juge des intentions et des pensées du
cœur » (He 4, 12),
comme « une semence impérissable » (1 P 1, 23)
qui, petite et cachée, germe et porte du fruit (cf. Mt 13).
Frères
et sœurs, que le dimanche de la Parole de Dieu nous aide à retourner avec joie
aux sources de la foi, cette foi qui naît de l’écoute de Jésus, Verbe du Dieu
vivant. Retournons aux sources pour offrir au monde l’eau vive qu’il ne trouve
pas, et tandis que la société et les réseaux sociaux accentuent la violence des
paroles, rechoisissons la douceur de la Parole de Dieu qui sauve, qui est
douce, qui ne fait pas de bruit, et qui entre dans le cœur.
3ème
dimanche de la Férie, dimanche de la Parole, 21 janvier 2024
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