Qu’est-ce que j’apporte au monde ?
Aujourd’hui, nous célébrons la Toussaint et dans la liturgie retentit le message “programmatique“ de Jésus, à savoir les Béatitudes (Mt 5, 1-12a). Elles nous montrent le chemin qui conduit au Royaume de Dieu et au bonheur : le chemin de l’humilité, de la compassion, de la douceur, de la justice et de la paix. Être saint signifie marcher sur ce chemin. Arrêtons-nous maintenant sur deux aspects de ce style de vie, deux aspects qui sont propres à ce style de vie de sainteté : la joie, et la prophétie.
La joie. Jésus commence
par le mot « bienheureux ». C’est l’annonce principale, celle d’un bonheur sans
précédent. La béatitude, la sainteté, ce n’est pas un programme de vie fait
uniquement d’efforts et de renoncements, mais c’est avant tout la joyeuse
découverte d’être des enfants aimés de Dieu, et cela nous remplit de joie. Ce
n’est pas une conquête humaine, c’est un don que nous recevons : nous sommes
saints parce que Dieu, qui est le Saint, vient habiter notre vie. C’est Lui qui
nous donne la sainteté, et c’est pour cela que nous sommes bienheureux !
La joie du chrétien
n’est pas alors l’émotion d’un instant, ou un simple optimisme humain,
mais la certitude de pouvoir affronter chaque situation sous le regard aimant
de Dieu, avec le courage et la force qui viennent de lui. Même au milieu de
nombreuses tribulations, les saints ont connu cette joie et ils en ont
témoigné. Un père du désert disait que la tristesse est “un ver du cœur“ qui
ronge la vie. Demandons-nous : Sommes-nous des chrétiens joyeux ? Suis-je un
chrétien joyeux, ou ne le suis-je pas ? Répandons-nous la joie, ou
sommes-nous des gens éteints, tristes, avec un visage funèbre ? Souvenons-nous
qu’il n’y a pas de sainteté sans joie !
Le deuxième aspect : la
prophétie. Les béatitudes s’adressent aux pauvres, aux affligés, aux
affamés de justice. C’est un message à contre-courant, en effet, le monde dit
que pour avoir le bonheur, vous devez être riche, puissant, toujours jeune et
fort, jouir de la notoriété et du succès.
Jésus renverse ces
critères et fait une annonce prophétique - c’est là la dimension
prophétique de la sainteté : la véritable plénitude de vie s’obtient en suivant
Jésus, en mettant sa Parole en pratique, et cela signifie une autre pauvreté,
c’est-à-dire être pauvre intérieurement, se vider de soi-même pour faire de la
place à Dieu.
Celui qui se croit riche,
gagnant, et en sécurité, fonde tout sur lui-même et il se ferme à Dieu et à ses
frères, tandis que celui qui se sait pauvre et sait ne pas se suffire
à lui-même reste ouvert à Dieu et au prochain, et il trouve la joie. Les
Béatitudes sont alors la prophétie d’une humanité nouvelle, d’une
nouvelle manière de vivre : se faire petit et s’en remettre à Dieu, au lieu de dominer
les autres. Être doux, au lieu d’essayer de s’imposer. Pratiquer la
miséricorde, plutôt que de penser seulement à soi-même. S’engager pour la
justice et la paix, au lieu de nourrir, y compris avec connivence, les
injustices et les inégalités.
La sainteté, c’est
accueillir et mettre en pratique, avec l’aide de Dieu, cette prophétie qui
révolutionne le monde. Nous pouvons donc nous demander : Est-ce que je témoigne
de la prophétie de Jésus ? Est-ce que j’exprime l’esprit prophétique que j’ai
reçu au baptême ? Ou est-ce que je m’adapte aux conforts de la vie et à ma
paresse, en pensant que tout va bien si cela va bien pour moi ? Est-ce que
j’apporte au monde la nouveauté joyeuse de la prophétie de Jésus dans le monde,
ou les plaintes habituelles sur ce qui ne va pas?
Que la Sainte Vierge nous
donne quelque chose de son âme, cette âme bienheureuse qui a magnifié avec joie
le Seigneur, qui « renverse les puissants de leurs trônes et élève les humbles »
(Lc 1, 52).
Angélus 1er novembre 2021
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