Sa
lumière resplendit dans l’amour humble
Épiphanie
: ce mot signifie la manifestation du Seigneur, qui, comme le dit
saint Paul dans la deuxième lecture (cf. Ep. 3,6), se révèle à
tous les peuples, représentés aujourd’hui par les Mages. Se
dévoile ainsi la merveilleuse réalité de Dieu qui est venu pour
tous : toutes les nations, langues et peuples sont accueillis par lui
et aimés de lui. Le symbole de cela est la lumière qui rejoint et
illumine toutes choses.
Maintenant,
si notre Dieu se manifeste à tous, il est cependant surprenant de
constater de quelle façon il se manifeste. « Où est le roi des
Juifs qui vient de naître ? » demandent les Mages (Mt 2,2). Ils le
trouveront, mais pas là où ils pensaient : non pas dans le palais
royal de Jérusalem, mais dans une humble demeure à Bethléem.
La
lumière de Dieu ne va pas chez celui qui brille de sa propre
lumière. Dieu se propose, il ne s’impose pas. Il éclaire, mais il
n’éblouit pas. C’est toujours une grande tentation de
confondre la lumière de Dieu et les lumières du monde. Combien de
fois nous avons suivi les éclats séduisants du pouvoir et de la
scène, convaincus de rendre un bon service à l’Évangile ! Mais
nous avons ainsi détourné les lumières du mauvais côté, parce
que Dieu n’était pas là : sa douce lumière resplendit dans
l’amour humble.
La
lumière de Dieu va chez celui qui l’accueille. Isaïe, dans la
première lecture (cf. Is 60,2) nous rappelle que la lumière divine
n’empêche pas les ténèbres et les brumes épaisses de recouvrir
la terre, mais qu’elle resplendit en celui qui est disposé à la
recevoir. C’est pourquoi le prophète lance une invitation qui
interpelle chacun de nous : « Debout, resplendis » (60,1).
Il
faut se mettre debout, c’est-à-dire se lever de sa propre
sédentarité et se disposer à marcher. Autrement on reste immobile,
comme les scribes consultés par Hérode, qui savaient bien où
devait naître le Messie, mais qui n’ont pas bougé. Et puis il est
nécessaire de se revêtir de Dieu qui est la lumière, chaque jour,
jusqu’à ce que Jésus devienne notre vêtement quotidien.
Mais
pour mettre l’habit de Dieu, qui est simple comme la lumière, il
faut d’abord se défaire des vêtements somptueux, autrement on
fait comme Hérode qui, à la lumière divine, préférait les
lumières terrestres du succès et du pouvoir. Les Mages, au
contraire, réalisent la prophétie : ils se lèvent pour être
revêtus de lumière. Eux seuls voient l’étoile dans le ciel : ni
les scribes, ni Hérode - personne à Jérusalem. Pour trouver Jésus,
il faut suivre un itinéraire différent, il faut prendre une voie
autre, la sienne, la voie de l’amour humble, et il faut s’y
maintenir. L’Évangile de ce jour conclut en disant que les Mages,
ayant rencontré Jésus, « regagnèrent leur pays par un autre
chemin » (Mt 2, 12). Un chemin autre, différent de celui d’Hérode.
Il
ne suffit pas de savoir “où“ Jésus est né, comme les scribes,
si nous ne rejoignons pas ce “où“. Quand son “où“ devient
le nôtre, que son “quand“ devient notre “quand“, sa personne
notre vie, alors les prophéties s’accomplissent en nous. Alors
Jésus naît au-dedans de nous et il devient Dieu vivant en moi.
Aujourd’hui,
nous sommes invités à imiter les Mages. Ils ne discutent pas, mais
ils marchent. Ils ne restent pas à regarder, mais ils entrent dans
la maison de Jésus. Ils ne se mettent pas au centre, mais ils se
prosternent devant lui qui est le centre. Ils ne se fixent pas sur
leurs plans, mais ils se disposent à prendre d’autres chemins.
Dans leurs actes, il y a un contact étroit avec le Seigneur, une
ouverture radicale à lui, une implication totale en lui. Leur
langage est le langage de l’amour, la langue même que Jésus,
encore enfant, parle déjà. Ils arrivent les bras chargés de
cadeaux.. Demandons-nous: à Noël avons-nous porté un cadeau à
Jésus, pour sa fête, ou avons-nous échangé des cadeaux seulement
entre nous ?
Apportons-lui
l’or, cet or considéré comme l’élément le plus précieux et
qui rappelle qu’à Dieu revient la première place : il doit
être adoré. Apportons-lui l’encens, qui symbolise la relation
avec le Seigneur, la prière qui, comme un parfum monte vers Dieu
(cf. Ps 141,2). Apportons-lui la myrrhe, cet onguent qui sera utilisé
pour envelopper avec amour le corps de Jésus descendu de la croix
(cf. Jn 19,39). Le Seigneur désire que nous prenions soin des corps
éprouvés par la souffrance, de la chair dans ce qu’elle a de plus
faible. Elle est précieuse aux yeux de Dieu la miséricorde envers
celui qui n’a rien à redonner, la gratuité !
En
ce temps de Noël qui s’achève, ne perdons pas l’occasion de
faire un beau cadeau à notre Roi, venu pour tous non pas sur les
scènes somptueuses du monde, mais dans la pauvreté lumineuse de
Bethléem. Si nous le faisons, sa lumière resplendira sur nous.
Homélie
du dimanche 6 janvier 2019