5 janvier 2019

Du Pape François


Laissons-nous regarder par Elle





« Tous ceux qui entendirent s’émerveillaient de ce que leur racontaient les bergers » (Lc 2, 18).
S’émerveiller, c’est à cela que nous sommes conviés aujourd’hui en conclusion de l’octave de Noël, le regard encore posé sur l’enfant né pour nous, pauvre de tout et riche en amour. Émerveillement, c’est l’attitude qu’il convient d’avoir en début d’année, parce que la vie est un don qui nous donne la possibilité de toujours recommencer.
Et aujourd’hui, c’est aussi le jour de nous émerveiller devant la Mère de Dieu : Dieu est un petit enfant, dans les bras d’une femme qui nourrit son Créateur. La statue qui se trouve devant nous représente la Mère et l’Enfant, unis au point de sembler n’être qu’une seule chose. C’est le mystère de ce jour, qui suscite un émerveillement infini : Dieu s’est lié à l’humanité pour toujours. Dieu et l’homme toujours ensemble, voilà la Bonne Nouvelle de début d’année.
Dieu n’est pas un maître distant qui habite, solitaire, dans les cieux. Il est l’Amour incarné, né comme nous d’une mère pour être le frère de chacun, pour être proche. Il est le Dieu de la proximité. Il est sur les genoux de sa mère, qui est aussi notre mère, et de là, il reverse sur l’humanité une tendresse nouvelle. Et nous comprenons mieux l’amour divin - cet amour qui est à la fois paternel et maternel -, comme celui d’une mère qui ne cesse de croire en ses fils, et qui ne les abandonne jamais. Le “Dieu-avec-nous“ nous aime, indépendamment de nos erreurs, de nos péchés, de la manière dont nous faisons aller le monde.
Au début de l’année, demandons à Marie la grâce de l’émerveillement devant le Dieu des surprises. Renouvelons notre émerveillement premier, quand la foi est née en nous. La Mère de Dieu nous aide : la Theotokos qui a engendré le Seigneur nous engendre au Seigneur. Elle est mère, et elle régénère chez ses enfants l’émerveillement de la foi. La vie sans émerveillement devient grise, routinière, et l’Eglise a besoin de renouveler son émerveillement d’être la demeure du Dieu vivant, l’Épouse du Seigneur, la Mère qui engendre des fils.
La Vierge apporte dans l’Eglise l’atmosphère de la maison, d’une maison habitée par le Dieu de la nouveauté. Accueillons avec émerveillement le mystère de la Mère de Dieu. Laissons-nous regarder par elle, laissons-nous embrasser, prendre par la main. Dans les moments de besoin, quand nous nous trouvons empêtrés dans les nœuds les plus compliqués de la vie, regardons vers la Vierge.
Mais surtout, laissons-nous regarder par elle. Quand elle nous regarde, elle ne voit pas des pécheurs, mais des fils. On dit que les yeux sont le miroir de l’âme. Eh bien les yeux de la Pleine de grâce reflètent la beauté de Dieu, ils réfléchissent sur nous le paradis. Jésus a dit que l’œil est « la lampe du corps » (Mt 6, 22). Les yeux de la Vierge savent éclairer toute obscurité, ils rallument partout l’espérance. Son regard, tourné vers nous, nous dit : “Chers enfants courage. Je suis là, votre Mère !”.
Ce regard maternel, qui donne confiance, aide à grandir dans la foi. La foi est un lien avec Dieu qui engage la personne tout entière, et pour être gardée, elle a besoin de la Mère de Dieu. Son regard maternel nous aide à nous voir, dans le peuple croyant de Dieu, comme des enfants aimés, et à nous aimer entre nous, au-delà des limites et des orientations de chacun.
La Vierge nous enracine dans l’Eglise, où l’unité compte plus que la diversité, et elle nous exhorte à prendre soin les uns des autres. Le regard de Marie rappelle que la tendresse - qui remédie à la tiédeur - est essentielle pour la foi. Quand dans la foi on fait place à la Mère de Dieu, on ne perd jamais le centre qu’est le Seigneur - car Marie ne se désigne jamais elle-même, mais Jésus -, ni les frères, parce que Marie est mère.
L’Evangile nous dit : « Marie, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (Lc 2, 19). Cela veut dire que la Vierge avait tout à cœur, elle embrassait tout, aussi bien les événements favorables que ceux qui étaient contraires, et elle méditait tout, c’est-à-dire portait tout à Dieu - voilà son secret. Et de la même manière, elle tient à cœur la vie de chacun de nous : elle désire embrasser toutes nos situations et les présenter à Dieu.
Dans la vie dispersée d’aujourd’hui, où nous risquons de perdre le fil, l’étreinte de la Mère est essentielle. Il y a partout tant d’éparpillement et de solitude : le monde est entièrement “connecté“, mais il semble être de plus en plus désuni. Nous avons besoin de nous confier à la Mère.
Dans l’Ecriture elle embrasse beaucoup de situations concrètes et elle est présente là où il y a besoin : elle se rend chez sa cousine Elisabeth, elle porte secours aux époux de Cana, elle encourage les disciples au Cénacle… Marie est un remède à la solitude et à la décomposition. Elle est la Mère de la consolation, celle qui “con-sole“ : elle est avec celui qui est seul ! Elle sait que, pour consoler, les paroles ne suffisent pas, il faut la présence, et elle est présente comme mère. Permettons-lui d’embrasser notre vie.
Dans le Salve Regina nous l’appelons “notre vie”, et ça paraît exagéré, car c’est le Christ qui est notre vie (cf. Jn 14, 6). Mais Marie est si unie à lui, et si proche de nous, qu’il n’y a rien de mieux que de mettre notre vie entre ses mains et de la reconnaître comme “notre vie, notre douceur, et notre espérance”.
Laissons-nous prendre par la main. Les mères prennent par la main les enfants et les introduisent avec amour dans la vie, et nous avons besoin d’apprendre des mères que l’héroïsme réside dans le fait de se donner, la force, dans le fait d’avoir de la pitié, la sagesse, dans la douceur.
Dieu ne s’est pas passé de sa Mère. À plus forte raison en avons-nous besoin. Jésus lui-même nous l’a donnée, non pas à n’importe quel moment, mais du haut de la Croix. Il a dit au disciple - et il dit à tout disciple : « Voici ta mère » (Jn 19, 27). La Vierge n’est pas optionnelle, elle doit être accueillie dans notre vie. Elle est la Reine de la paix, celle qui est victorieuse du mal et qui conduit sur les voies du bien, qui rétablit l’unité entre ses enfants, qui éduque à la compassion.
Prends-nous par la main, Marie. Agrippés à toi, nous passerons les virages les plus difficiles de l’histoire. Notre main dans ta main, amène-nous à redécouvrir les liens qui nous unissent. Rassemble-nous tous sous ton manteau, dans la tendresse de l’amour vrai où se reconstitue la famille humaine. Et tous ensemble nous te disons : “Sous ta protection nous cherchons refuge, Sainte Mère de Dieu”.

Homélie de la messe du 1er janvier 2019 Fête de Marie Mère de Dieu




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