21 septembre 2019

Du Pape François



Aux jeunes évêques : Soyez proches, de Dieu et de votre peuple





En tant que nouveaux membres du Collège épiscopal, vous êtes récemment descendus sur la tombe de Pierre. Là, vous avez confessé la même foi que celle de l’apôtre. Ce n’est pas une théorie, mais une personne, Jésus. Son visage nous rend proche le regard de Dieu. Notre monde cherche, même inconsciemment, cette proximité divine. Sans cette proximité d’amour, le fondement de la réalité vacille. L’Église elle-même s’égare quand elle perd la tendresse vivifiante du Bon Pasteur. Ici, vous avez confié vos Églises, pour elles vous avez redit avec Jésus : « corps offert et sang versé pour vous ». Nous ne connaissons pas d’autre force que celle-ci, la force du Bon Pasteur, la force de donner sa vie, d’approcher l’Amour par le moyen de l’amour. Voilà notre mission : être pour l’Église et pour le monde “sacrements“ de la proximité de Dieu. Je voudrais donc vous dire quelque chose sur la proximité, essentielle pour tous les ministres de Dieu, et surtout pour les évêques. Proximité à l’égard de Dieu, et proximité à l’égard de son peuple.
La proximité à l’égard de Dieu est la source du ministère de l’évêque. Dieu nous aime, il s’est fait plus proche que ce que nous pouvions imaginer, il a pris notre chair pour nous sauver. Cette annonce est le cœur de la foi, elle doit précéder et animer toutes nos initiatives. Nous existons pour rendre palpable cette proximité. Mais on ne peut communiquer la proximité de Dieu sans en faire l’expérience, sans l’expérimenter tous les jours, sans se laisser contaminer par sa tendresse. Tous les jours, sans économiser son temps, il faut rester devant Jésus, lui apporter les personnes, les situations, en étant comme des canaux toujours ouverts entre lui et notre peuple.
Sans cette confiance personnelle, sans cette intimité cultivée tous les jours dans la prière, y compris et surtout dans les heures de désolation et d’aridité, le cœur de notre mission épiscopale se délite. Sans une proximité avec le Semeur, la fatigue de jeter la semence sans connaître le temps de la récolte nous semblera peu gratifiante. Sans le Semeur, il sera difficile d’accompagner avec une confiance patiente la lenteur de la maturation. Sans Jésus, viendra le découragement à l’idée qu’il n’accomplira pas son œuvre. Sans lui, tôt ou tard, on glisse dans la mélancolie pessimiste de celui qui dit : Tout va mal ! C’est triste d’entendre un évêque dire cela ! C’est seulement en restant avec Jésus que nous sommes préservés de la présomption de croire que le bien découle de notre bravoure. C’est seulement en restant avec Jésus que vient dans le cœur cette paix profonde que nos frères et sœurs cherchent chez nous.
De la proximité à l’égard de Dieu, nous irons à la proximité à l’égard de son peuple. En restant proches du Dieu de la proximité, nous grandissons dans la conscience que notre identité consiste à nous rendre proches. Ce n’est pas une obligation extérieure, mais une exigence interne à la logique du don. « Ceci est mon Corps livré pour vous », disons-nous au moment le plus haut de l’offrande eucharistique pour notre peuple. Notre vie jaillit de là et nous pousse à devenir des pains rompus pour la vie du monde. La proximité à l’égard du peuple qui nous est confié n’est pas une stratégie opportuniste, mais notre condition essentielle. Jésus aime s’approcher de ses frères en passant par nous, en passant par nos mains ouvertes qui caressent et consolent ; par nos paroles, prononcées pour oindre le monde de l’Évangile et non de nous-mêmes ; par notre cœur, lorsqu’il se charge des angoisses et des joies de nos frères.
Malgré notre pauvreté, il dépend de nous que personne ne perçoive Dieu comme lointain, que personne ne prenne Dieu comme un prétexte pour élever des murs, abattre des ponts et semer la haine. Nous avons à annoncer par notre vie une mesure de vie différente de celle du monde : la mesure d’un amour sans mesure, qui ne cherche pas ce qui lui est utile ou son profit, mais l’horizon sans limite de la miséricorde de Dieu.
Être proches, c’est s’identifier avec le peuple de Dieu, partager ses peines, ne pas dédaigner ses espérances. Être proches du peuple, c’est avoir confiance que la grâce de Dieu, qui se répand fidèlement sur lui et dont nous sommes les canaux, y compris à travers les croix que nous portons, est plus grande que la boue dont nous avons peur.
Aujourd’hui il semble qu’il y ait des stéthoscopes qui réussissent à entendre un cœur à un mètre de distance. Il nous faut des évêques capables d’entendre le battement du cœur de leur communauté et de leurs prêtres, même à distance : entendre le battement de cœur…. Des pasteurs qui ne se contentent pas d’une présence formelle, de rencontres officielles ou de dialogues de circonstance.
Enfin, je vous demande aussi de réserver la plus grande proximité pour vos prêtres : le prêtre est le prochain le plus proche de l’évêque et il faut aimer son prochain le plus proche. Je vous prie de les embrasser, de les remercier et de les encourager de ma part. Ils sont eux aussi exposés aux intempéries d’un monde qui, bien que lassé des ténèbres, n’épargne pas son hostilité à la lumière. Ils ont besoin d’être aimés, suivis, encouragés : Dieu ne désire pas de demi-mesures de leur part, mais un oui total. Dans les eaux peu profondes, on stagne, mais leur vie est faite pour prendre le large. Comme la vôtre. Courage, donc, très chers frères ! Je vous remercie et je vous bénis.
S’il vous plaît, souvenez-vous de prier aussi pour moi tous les jours. Merci.

Aux jeunes évêques participant à la formation organisée par la Congrégation pour les évêques et par la Congrégation pour les Églises orientales, jeudi 12 septembre 2019


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