Aux
jeunes évêques : Soyez proches, de Dieu et de votre peuple
En
tant que nouveaux membres du Collège épiscopal, vous êtes
récemment descendus sur la tombe de Pierre. Là, vous avez confessé
la même foi que celle de l’apôtre. Ce n’est pas une théorie,
mais une personne, Jésus. Son visage nous rend proche le regard de
Dieu. Notre monde cherche, même inconsciemment, cette proximité
divine. Sans cette proximité d’amour, le fondement de la réalité
vacille. L’Église elle-même s’égare quand elle perd la
tendresse vivifiante du Bon Pasteur. Ici, vous avez confié vos
Églises, pour elles vous avez redit avec Jésus : « corps
offert et sang versé pour vous ». Nous ne connaissons pas
d’autre force que celle-ci, la force du Bon Pasteur, la force de
donner sa vie, d’approcher l’Amour par le moyen de l’amour.
Voilà notre mission : être pour l’Église et pour le monde
“sacrements“ de la proximité de Dieu. Je voudrais donc vous dire
quelque chose sur la proximité, essentielle pour tous les ministres
de Dieu, et surtout pour les évêques. Proximité à l’égard
de Dieu, et proximité à l’égard de son peuple.
La
proximité à l’égard de Dieu est la source du ministère
de l’évêque. Dieu nous aime, il s’est fait plus proche que ce
que nous pouvions imaginer, il a pris notre chair pour nous sauver.
Cette annonce est le cœur de la foi, elle doit précéder et animer
toutes nos initiatives. Nous existons pour rendre palpable cette
proximité. Mais on ne peut communiquer la proximité de Dieu sans en
faire l’expérience, sans l’expérimenter tous les jours, sans se
laisser contaminer par sa tendresse. Tous les jours, sans économiser
son temps, il faut rester devant Jésus, lui apporter les personnes,
les situations, en étant comme des canaux toujours ouverts entre lui
et notre peuple.
Sans
cette confiance personnelle, sans cette intimité cultivée tous les
jours dans la prière, y compris et surtout dans les heures de
désolation et d’aridité, le cœur de notre mission épiscopale se
délite. Sans une proximité avec le Semeur, la fatigue de jeter la
semence sans connaître le temps de la récolte nous semblera peu
gratifiante. Sans le Semeur, il sera difficile d’accompagner avec
une confiance patiente la lenteur de la maturation. Sans Jésus,
viendra le découragement à l’idée qu’il n’accomplira pas son
œuvre. Sans lui, tôt ou tard, on glisse dans la mélancolie
pessimiste de celui qui dit : Tout va mal ! C’est
triste d’entendre un évêque dire cela ! C’est seulement en
restant avec Jésus que nous sommes préservés de la présomption de
croire que le bien découle de notre bravoure. C’est seulement en
restant avec Jésus que vient dans le cœur cette paix profonde que
nos frères et sœurs cherchent chez nous.
De
la proximité à l’égard de Dieu, nous irons à la proximité
à l’égard de son peuple. En restant proches du Dieu de la
proximité, nous grandissons dans la conscience que notre identité
consiste à nous rendre proches. Ce n’est pas une obligation
extérieure, mais une exigence interne à la logique du don. « Ceci
est mon Corps livré pour vous », disons-nous au moment le plus
haut de l’offrande eucharistique pour notre peuple. Notre vie
jaillit de là et nous pousse à devenir des pains rompus pour la vie
du monde. La proximité à l’égard du peuple qui nous est confié
n’est pas une stratégie opportuniste, mais notre condition
essentielle. Jésus aime s’approcher de ses frères en passant par
nous, en passant par nos mains ouvertes qui caressent et consolent ;
par nos paroles, prononcées pour oindre le monde de l’Évangile et
non de nous-mêmes ; par notre cœur, lorsqu’il se charge des
angoisses et des joies de nos frères.
Malgré
notre pauvreté, il dépend de nous que personne ne perçoive Dieu
comme lointain, que personne ne prenne Dieu comme un prétexte pour
élever des murs, abattre des ponts et semer la haine. Nous avons à
annoncer par notre vie une mesure de vie différente de celle du
monde : la mesure d’un amour sans mesure, qui ne cherche pas
ce qui lui est utile ou son profit, mais l’horizon sans limite de
la miséricorde de Dieu.
Être
proches, c’est s’identifier avec le peuple de Dieu, partager ses
peines, ne pas dédaigner ses espérances. Être proches du peuple,
c’est avoir confiance que la grâce de Dieu, qui se répand
fidèlement sur lui et dont nous sommes les canaux, y compris à
travers les croix que nous portons, est plus grande que la boue dont
nous avons peur.
Aujourd’hui
il semble qu’il y ait des stéthoscopes qui réussissent à
entendre un cœur à un mètre de distance. Il nous faut des évêques
capables d’entendre le battement du cœur de leur communauté et de
leurs prêtres, même à distance : entendre le battement de
cœur…. Des pasteurs qui ne se contentent pas d’une présence
formelle, de rencontres officielles ou de dialogues de circonstance.
Enfin,
je vous demande aussi de réserver la plus grande proximité pour vos
prêtres : le prêtre est le prochain le plus proche de l’évêque
et il faut aimer son prochain le plus proche. Je vous prie de les
embrasser, de les remercier et de les encourager de ma part. Ils sont
eux aussi exposés aux intempéries d’un monde qui, bien que lassé
des ténèbres, n’épargne pas son hostilité à la lumière. Ils
ont besoin d’être aimés, suivis, encouragés : Dieu ne
désire pas de demi-mesures de leur part, mais un oui total. Dans les
eaux peu profondes, on stagne, mais leur vie est faite pour prendre
le large. Comme la vôtre. Courage, donc, très chers frères !
Je vous remercie et je vous bénis.
S’il
vous plaît, souvenez-vous de prier aussi pour moi tous les jours.
Merci.
Aux
jeunes évêques participant à la formation organisée par la
Congrégation pour les évêques et par la Congrégation pour les
Églises orientales, jeudi 12 septembre 2019
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