6 juin 2020

Du Pape François


Divers, et unis par le même Esprit Saint


« Les dons de la grâce sont variés, mais c’est le même Esprit » (1 Co 12, 4), c’est ce qu’écrit l’apôtre Paul aux Corinthiens. Et il poursuit: « Les services sont variés, mais c’est le même Seigneur. Les activités sont variées, mais c’est le même Dieu ». “Variés“ et “le même“ : saint Paul insiste pour réunir deux paroles qui semblent s’opposer. Il veut nous dire que l’Esprit Saint est ce même qui met ensemble des choses variées, et que l’Église est née ainsi : nous, divers, unis par le même Esprit Saint.
Allons donc aux débuts de l’Église, au jour de la Pentecôte, et regardons les apôtres. Parmi eux il y a des gens simples, habitués à vivre du travail de leurs mains comme les pêcheurs, et puis il y a Matthieu, un percepteur d’impôts érudit… Il y a diverses provenances et divers contextes sociaux, des noms juifs et des noms grecs, des caractères doux et d’autres fougueux, des façons de voir et des sensibilités différentes. Ils sont tous différents et Jésus ne les a pas changés, il ne les a pas uniformisés en une série de maquettes, non. Il leur a laissé leur diversité, et maintenant, il les unit en les oignant du Saint Esprit - l’union, l’union de leurs diversités arrive grâce à l’onction.
À la Pentecôte, les apôtres découvrent la force unificatrice de l’Esprit : ils la voient de leurs yeux quand tous, bien que parlant diverses langues, forment un seul peuple, le peuple de Dieu façonné par l’Esprit, cet Esprit qui tisse l’unité avec nos diversités, qui donne l’harmonie parce que l’Esprit est harmonie.
Venons-en mainteant à nous, Église d’aujourd’hui. Nous pouvons nous demander : Qu’est ce qui nous unit, sur quoi se fonde notre unité ? Parmi nous aussi, il y a des diversités, des diversités d’opinions, de choix, de sensibilité. La tentation est toujours celle de vouloir défendre à tout prix nos idées en les croyant bonnes pour tous, et en étant d’accord seulement avec celui qui pense comme nous. C’est une mauvaise tentation, qui divise.
Notre principe d’unité, c’est le Saint Esprit. Il nous rappelle que nous sommes avant tout, enfants aimés de Dieu, tous égaux en cela, et tous divers. L’Esprit vient à nous avec toutes nos diversités et nos misères, pour nous dire que nous avons un seul Seigneur, Jésus, et un seul Père, et que pour cela nous sommes frères et sœurs ! Repartons à partir de là, regardons l’Église comme le fait l’Esprit, et non pas comme le fait le monde.
Le monde nous voit de droite ou de gauche, avec telle idéologie ou telle autre - l’Esprit nous voit à partir du Père et de Jésus. Le monde voit des conservateurs et des progressistes - l’Esprit voit des enfants de Dieu. Le regard mondain voit des structures à rendre plus efficaces, tandis que le regard spirituel voit des frères et sœurs, mendiants de miséricorde. L’Esprit nous aime et connaît la place de chacun à l’intérieur de l’ensemble : pour lui, nous ne sommes pas des confettis emportés par le vent, mais des pièces irremplaçables de sa mosaïque.
Revenons au jour de la Pentecôte et découvrons la première œuvre de l’Église : l’annonce. Nous constatons que les Apôtres ne préparent pas une stratégie : quand ils sont enfermés dans le Cénacle, ils ne font pas de stratégie, ils ne préparent pas un plan pastoral ! Ils auraient pu subdiviser les gens en groupes selon les divers peuples, parler premièrement aux plus proches, et ensuite aux plus lointains, tout en ordre… Ils auraient aussi pu attendre un peu avant d’annoncer, et en attendant, approfondir les enseignements de Jésus afin d’éviter les risques… Non. L’Esprit ne veut pas que le souvenir du Maître soit cultivé dans des groupes fermés, dans des cénacles où on prend goût à faire son nid. C’est une mauvaise maladie qui peut arriver dans l’Église : l’Église non pas comme une communauté, non pas comme une famille, non pas comme une mère, mais comme un nid !
L’Esprit ouvre, relance, pousse au-delà du déjà dit et du déjà fait, il pousse au-delà des barrières d’une foi timide et prudente. Dans le monde, sans une organisation solide et une stratégie calculée, on va à la dérive. Dans l’Église au contraire, c’est l’Esprit qui garantit l’unité à celui qui annonce, et les apôtres vont : non préparés, ils se lancent, ils sortent. Un seul désir les anime : donner ce qu’ils ont reçu, et il est beau ce début de la première lettre de Jean : « Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons à vous aussi » (Jn 1, 3).
Nous comprenons quel est le secret de l’unité, le secret de l’Esprit : le secret de l’unité dans l’Église, le secret de l’Esprit, c’est le don. Parce qu’il est don, il vit en se donnant, et il nous maintient ensemble en nous faisant participants du même don. Si nous nous rendons compte que ce que nous sommes est don de Dieu, don gratuit et immérité, alors nous aussi, nous voudrons faire de notre vie un don. Et en aimant humblement, en servant gratuitement et avec joie, nous offrirons au monde le vrai visage de Dieu.
L’Esprit, mémoire vivante de l’Église, nous rappelle que nous sommes nés d’un don et que nous grandissons en nous donnant. Non pas en nous conservant, mais en nous donnant.

Homélie à la messe de la Pentecôte 31 mai 2020



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