5 décembre 2020

Du Pape François

 

Veiller, et aimer



Les lectures du premier dimanche de l’Avent nous suggèrent deux paroles-clés pour ce temps qui nous conduit à Noël : proximité et vigilance. Proximité de Dieu et vigilance de notre part : alors que le prophète Isaïe dit que Dieu est proche de nous, Jésus dans l’Évangile nous exhorte à veiller dans son attente.

Proximité. Isaïe commence en tutoyant Dieu : « C’est toi, Seigneur, notre père » (Is 63, 16). Et il continue : « Jamais on n’a entendu dire qu’un autre dieu que toi ait pu agir ainsi pour celui qui l’attend ». Il nous vient à l’esprit les paroles du Deutéronome : « Qui comme le Seigneur notre Dieu est proche de nous chaque fois que nous l’invoquons ? » (Dt 4,7). L’Avent est le temps où il faut faire mémoire de la proximité de Dieu qui est descendu vers nous. Mais le prophète va au-delà et demande à Dieu de se rapprocher encore : « Si tu déchirais les cieux, si tu descendais ! » Nous l’avons nous aussi demandé dans le Psaume : « Reviens, visite-nous, viens nous sauver ! » “O Dieu, viens à mon secours“, c’est souvent là le début de notre prière, et le premier pas de la foi est de dire au Seigneur que nous avons besoin de lui, de sa proximité.

C’est aussi le premier message de l’Avent et de l’Année liturgique, reconnaître que Dieu est proche et lui dire : Approche-toi encore ! Il veut venir tout proche de nous, mais il se propose, il ne s’impose pas. C’est à nous qu’il revient de ne pas nous fatiguer de lui dire : Viens ! C’est la prière de l’Avent : Viens ! Jésus, nous rappelle l’Avent, est venu parmi nous et viendra de nouveau à la fin des temps, mais nous nous demandons, à quoi servent ces venues s’il ne vient pas aujourd’hui dans notre vie ?

Invitons-le. Faisons nôtre la grande invocation de l’Avent : « Viens, Seigneur Jésus ! » C’est avec cette invocation que finit l’Apocalypse : « Viens, Seigneur Jésus » (Ap 22, 20). Nous pouvons la dire au début de chaque journée, et la répéter souvent, avant les rencontres, l’étude, le travail et les décisions à prendre, dans les moments plus importants et dans ceux de l’épreuve : Viens, Seigneur Jésus ! Une petite prière, mais qui naît du cœur. Disons-la en ce temps de l’Avent, répétons-là : « Viens, Seigneur Jésus ! ».

En invoquant ainsi la proximité du Seigneur, nous exercerons notre vigilance. L’Évangile de Marc nous propose aujourd’hui la fin du dernier discours de Jésus. Il est condensé en une seule parole : « Veillez ! ». Le Seigneur la répète quatre fois dans cinq versets. Il est important de rester vigilants, parce qu’une erreur de la vie est de se perdre en mille choses, et de ne pas s’apercevoir de la présence de Dieu. Saint Augustin disait : J’ai peur que Jésus passe, et que moi je ne m’en rende pas compte ! Nous sentons cela tous les jours, attirés par nos intérêts, et distraits par tant de vanités, nous risquons de perdre l’essentiel. C’est pourquoi, le Seigneur répète aujourd’hui à tous : « Veillez ! » - soyez attentifs, veillez !

Mais si devons veiller, c’est que nous sommes encore dans la nuit. Oui, maintenant nous ne vivons pas dans le jour, mais dans l’attente du jour. Le jour arrivera quand nous serons avec le Seigneur. Il arrivera, ne perdons pas courage : la nuit passera, le Seigneur se lèvera, lui qui est mort en croix pour nous. Veiller, c’est attendre cela, c’est de ne pas se laisser submerger par le découragement, et cela s’appelle vivre dans l’espérance. Comme avant de naître nous avons été attendus par ceux qui nous aimaient, maintenant nous sommes attendus par l’Amour en personne. Alors pourquoi perdre du temps à nous plaindre de la nuit alors que la lumière du jour nous attend ?

C’est la foi qui nous donne de veiller. La foi est le contraire de la médiocrité : elle est ardent désir de Dieu, elle est audace continue de se convertir, elle est courage d’aimer, elle est d’aller toujours de l’avant. La foi n’est pas une eau qui éteint, elle est un feu qui brûle, elle n’est pas un calmant pour celui qui est stressé, elle est une histoire d’amour pour celui qui est amoureux ! C’est pourquoi Jésus déteste plus que tout la tiédeur (cf. Ap 3, 16).

Comment pouvons-nous nous réveiller du sommeil de la médiocrité ? Par la vigilance de la prière. Prier, c’est allumer une lumière dans la nuit. La prière réveille de la tiédeur d’une vie horizontale, élève le regard vers le haut, nous harmonise avec le Seigneur. La prière permet à Dieu d’être proche de nous, c’est pourquoi elle libère de la solitude et donne l’espérance. La prière oxygène la vie : tout comme on ne peut pas vivre sans respirer, de même on ne peut pas être chrétien sans prier. Et on a tant besoin de chrétiens qui veillent pour ceux qui dorment, d’adorateurs, d’intercesseurs, qui portent jour et nuit devant Jésus, lumière du monde, les ténèbres de l’histoire. Nous avons besoin d’adorateurs, qui savent rester en silence devant le Seigneur, en adorant.

Il y a encore un second sommeil intérieur : le sommeil de l’indifférence. Celui qui est indifférent voit tout égal, comme de nuit, et il ne s’intéresse pas à celui qui lui est proche. Lorsque nous tournons seulement autour de nous-mêmes et de nos besoins, indifférents à ceux d’autrui, la nuit descend dans notre cœur et le cœur devient obscur. Très vite, on commence à se plaindre de tout, puis on se sent victime de tous, et finalement on fait des complots sur tout. Plaintes, sentiment d’être victime, et complots : c’est un enchaînement.  

Comment nous réveiller de ce sommeil de l’indifférence ? par la vigilance de la charité. Pour apporter la lumière dans ce sommeil de la médiocrité, de la tiédeur, il y a la vigilance de la prière. Pour nous réveiller de ce sommeil de l’indifférence, il y a la vigilance de la charité. La charité est le cœur battant du chrétien : tout comme on ne peut vivre sans battement du cœur, de même on ne peut être chrétien sans la charité. Pour certains, on dirait qu’éprouver de la compassion, aider, servir, est une chose pour les perdants ! En réalité c’est l’unique chose gagnante parce qu’elle est déjà projetée vers le futur, vers le Jour du Seigneur quand tout passera et qu’il ne restera que l’amour. C’est avec les œuvres de miséricorde que nous nous approchons du Seigneur.

Chers frères et sœurs, prier et aimer, voilà la vigilance. Quand l’Église adore Dieu et sert le prochain, elle ne vit pas dans la nuit. Même si elle est fatiguée et éprouvée, elle chemine vers le Seigneur. Invoquons-le : Viens, Seigneur Jésus, nous avons besoin de toi. Viens tout près de nous. Tu es la lumière : réveille-nous du sommeil de la médiocrité, réveille-nous des ténèbres de l’indifférence. Viens, Seigneur Jésus, rends vigilants nos cœurs qui maintenant sont distraits : fais-nous ressentir le désir de prier et le besoin d’aimer.


Homélie du premier dimanche de l’Avent 29 novembre 2020




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