1 juin 2015

Du Pape François 27/05/2015


Les fiançailles

Chers frères et sœurs, bonjour !

Poursuivant ces catéchèses sur la famille, je voudrais aujourd’hui parler des fiançailles. Les fiançailles - ça s’entend dans le mot italien : fidanzamento - ont à voir avec la confiance, la familiarité, la fiabilité… la familiarité avec la vocation que Dieu donne, parce que le mariage est avant tout la découverte d’un appel de Dieu. C’est certainement quelque chose de beau, que les jeunes, aujourd’hui, puissent choisir de se marier sur la base d’un amour réciproque. Mais justement, la liberté de ce lien requiert une harmonie dans une décision prise d’une manière consciente, et non pas seulement une simple entente sur l’attirance ou sur le sentiment d’un moment, d’un temps bref… Ça requiert un cheminement.
En d’autres termes, les fiançailles sont un temps dans lequel les deux personnes sont appelées à faire un beau travail, un travail sur l’amour, un travail commun, partagé, qui aille en profondeur. On se découvre l’un l’autre petit à petit, c’est-à-dire que l’homme “apprend“ la femme en apprenant cette femme, sa fiancée. Et la femme “apprend“ l’homme en apprenant cet homme, son fiancé. Ne sous-estimons pas l’importance de cet apprentissage : c’est un bel engagement, et l’amour même le demande, parce que l’amour, ce n’est pas seulement un bonheur insouciant, une émotion fascinée…
Le récit biblique parle de toute la création comme d’une belle œuvre de l’amour de Dieu, et le livre de la Genèse dit que « Dieu vit tout ce qu’il avait fait, et voici que cela était très bon » (Gn 1,31). Et c’est seulement à la fin que Dieu « se repose ». Cette image nous fait comprendre que l’amour de Dieu, qui est à l’origine du monde, ne fut pas une décision improvisée, non ! Ce fut un beau travail : l’amour de Dieu a créé les conditions concrètes d’une alliance irrévocable, solide, destinée à durer.
Eh bien l’alliance d’amour entre l’homme et la femme, une alliance pour la vie, ne s’improvise pas, ne se fait pas du jour au lendemain. Le mariage express, ça n’existe pas. Il faut travailler sur l’amour, il faut cheminer. L’alliance de l’amour de l’homme et de la femme s’apprend et s’affine. Je me permets de dire que c’est une alliance “artisanale“ : faire de deux vies une seule vie, c’est presque un miracle, un miracle de la liberté et du cœur, confié à la foi. Nous devrions peut-être nous engager plus nettement sur ce point, parce que nos “coordonnées sentimentales“ sont un peu désorientées. Celui qui prétend vouloir tout, tout de suite, cède ensuite aussi sur tout - et tout de suite - à la première difficulté, ou à la première occasion.
On ne peut pas espérer la confiance et la fidélité du don de soi si l’habitude qui prévaut est de consommer l’amour, comme une sorte d’ “intégrateur“ de bien-être psycho-physique. L’amour, ce n’est pas ça ! Les fiançailles mettent en lumière la volonté de garder quelque chose qui ne devra jamais être acheté ou vendu, trahi ou abandonné, quelque alléchante que puisse être l’offre. Et Dieu lui-même, quand il parle de l’alliance avec son peuple, le fait parfois en termes de fiançailles. Dans le livre de Jérémie, quand il parle au peuple qui s’est éloigné de lui, il lui rappelle ce temps où il était la « fiancée » de Dieu en disant : « Je me souviens de la tendresse de tes jeunes années, ton amour de fiancée » (2,2). Dieu a fait ce parcours de fiançailles, et il fait aussi une promesse - nous l’avons entendu au début de l’audience, dans le livre d’Osée : « Je ferai de toi mon épouse pour toujours, je ferai de toi mon épouse dans la justice et le droit, dans la tendresse et la miséricorde. Je ferai de toi mon épouse dans la fidélité, et tu connaîtras le Seigneur. » (2,21-22). C’est une longue route que fait le Seigneur avec son peuple, dans ce cheminement de fiançailles.
Au terme, Dieu épouse son peuple en Jésus Christ : il épouse l’Église en Jésus. Le peuple de Dieu est l’épouse de Jésus. Mais quel chemin ! Vous, les Italiens, dans votre littérature, vous avez un chef-d’œuvre sur les fiançailles (Les fiancés, de Manzoni). Il faut que les jeunes le connaissent, qu’ils le lisent : c’est un chef-d’œuvre où l’on raconte l’histoire de fiancés qui ont connu de grandes souffrances, qui ont parcouru une route semée de nombreuses difficultés, jusqu’à ce qu’ils arrivent au bout : au mariage. Ne laissez pas de côté ce chef-d’œuvre sur les fiançailles que la littérature italienne vous offre. Avancez, lisez-le, et vous verrez la beauté, la souffrance, mais aussi la fidélité des fiancés.
Dans sa sagesse, l’Église garde la distinction entre être fiancés, et être époux - ce n’est pas la même chose -, précisément en vue de la délicatesse et de la profondeur de cette mise en vérité. Soyons attentifs à ne pas prendre trop à la légère et à mépriser ce sage enseignement, qui se nourrit de l’expérience de l’amour conjugal vécu dans le bonheur. Le corps, dans son symbolisme fort, détient les clés de l’âme : nous ne pouvons pas traiter à la légère les liens de la chair, sans ouvrir des blessures durables dans l’esprit (1 Cor 5,15-20).
Certes, la culture et la société actuelle sont devenues plutôt indifférentes à la délicatesse et au sérieux de cette étape. D’autre part, on ne peut pas dire qu’elles soient généreuses avec les jeunes qui ont sérieusement l’intention de fonder un foyer et de mettre des enfants au monde ! Au contraire, souvent elles mettent mille obstacles, mentaux et pratiques. Or les fiançailles sont un chemin de vie qui doit mûrir comme les fruits, c’est une route de maturation dans l’amour, jusqu’au moment où ça devient le mariage.
Les cours de préparation au mariage sont une expression particulière de cette préparation. Nous voyons de nombreux couples qui arrivent un peu à contrecœur : « Ces prêtres, qui nous font suivre une formation ! Mais pourquoi ? Nous savons, nous ! » et ils viennent à contrecœur. Mais après, ils sont contents et ils remercient, parce qu’ils ont en effet trouvé là l’occasion - souvent la seule ! - de réfléchir sur leur expérience dans des termes qui ne sont pas habituels. Oui, beaucoup de couples sont ensemble depuis longtemps, peut-être aussi dans une relation intime, souvent ils vivent ensemble, mais ils ne se connaissent pas vraiment. Ça semble étrange, mais l’expérience le prouve. C’est pourquoi il faut revaloriser les fiançailles comme un temps de connaissance réciproque et de partage d’un projet. Le chemin de préparation au mariage doit être organisé dans cette perspective, en s’appuyant aussi sur le témoignage simple, mais intense, d’époux chrétiens. Et en orientant vers l’essentiel : la Bible à redécouvrir ensemble dans une prise de conscience, la prière dans sa dimension liturgique, mais aussi dans celle de “prière domestique“ à vivre en famille, les sacrements, la vie sacramentelle, la confession… tout ce par quoi le Seigneur vient demeurer chez les fiancés et les prépare à s’accueillir vraiment l’un l’autre « avec la grâce du Christ ». Et aussi la fraternité avec les pauvres, avec les personnes démunies, qui nous provoquent à la sobriété et au partage. Les fiancés qui s’engagent ainsi grandissent tous deux et tout cela amène à préparer un beau mariage, célébré de manière différente, non pas mondaine, mais de manière chrétienne !
Pensons à ces paroles de Dieu que nous avons entendues quand il parle à son peuple comme le fiancé à sa fiancée : « Je ferai de toi mon épouse pour toujours, je ferai de toi mon épouse dans la justice et le droit, dans la tendresse et la miséricorde. Je ferai de toi mon épouse dans la fidélité, et tu connaîtras le Seigneur. » (Os 2,21-22). Que tous les couples de fiancés pensent à cela et se disent l’un à l’autre : « Je ferai de toi mon épouse, je ferai de toi mon époux ». Attendre ce moment… C’est un moment, vers lequel on avance lentement : c’est un parcours de maturation, et les étapes du chemin ne doivent pas être brûlées. La maturation se fait ainsi, pas à pas.
Le temps des fiançailles peut alors vraiment devenir un temps d’initiation. À quoi ? À la surprise ! À la surprise des dons spirituels avec lesquels le Seigneur, à travers l’Église, enrichit l’horizon de la nouvelle famille qui se dispose à vivre dans sa bénédiction.
Maintenant, je vous invite à prier la Sainte Famille de Nazareth : Jésus, Joseph et Marie. Prier pour que la future famille fasse ce chemin de préparation, prier pour les fiancés. Prions la Vierge Marie tous ensemble, prions un ‘Je vous salue Marie’ pour tous les fiancés, pour qu’ils puissent comprendre la beauté de ce chemin vers le mariage.
Et aux fiancés qui sont sur la Place : Bon chemin de fiançailles !

Catéchèse du pape François du 27 mai 2015






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