16 juin 2018

Du Pape François


Vivre de façon eucharistique




Dans l’Évangile que nous avons entendu, est racontée la dernière Cène, mais d’une façon surprenante, l’attention est placée davantage sur ses préparatifs que sur le repas même. Le verbe “préparer” revient plusieurs fois. Les disciples demandent par exemple : Où veux-tu que nous allions “faire les préparatifs“ pour que tu manges la Pâque ? (Mc 14, 12). Jésus les envoie préparer avec des indications précises, et ils trouvent une grande pièce aménagée et « prête pour un repas ». Les disciples vont donc préparer, mais le Seigneur avait déjà préparé…
Quelque chose de semblable arrive après la résurrection, quand Jésus apparaît aux disciples pour la troisième fois. Tandis qu’ils pêchent, il les attend sur le rivage où il a déjà préparé le pain et le poisson pour eux. Mais en même temps, il leur demande d’apporter un peu de ce poisson qu’ils viennent de prendre - et que lui-même avait indiqué comment pêcher (cf. Jn 21, 6.9-10). Là aussi, Jésus prépare à l’avance, et il demande aux siens de collaborer.
Avant la Pâque, Jésus avait dit aux disciples « Je pars vous préparer une place, afin que là où je suis, vous soyez, vous aussi » (Jn 14, 2-3). C’est donc Jésus qui prépare, et c’est lui qui, avec des rappels forts et des paraboles, nous demande de nous préparer, de nous tenir prêts (cf. Mt 24, 44 ; Lc 12, 40).
Que prépare Jésus pour nous ? Il prépare une place, et il prépare une nourriture. Il prépare une place beaucoup plus digne que la « grande pièce aménagée » de l’Évangile. Il prépare pour nous cette maison spacieuse et vaste qu’est ici-bas, l’Église, où il y a et il doit y avoir une place pour tous. Mais il nous a réservé aussi une place là-haut dans le paradis, pour être avec lui et entre nous pour toujours.
Et il nous prépare aussi une nourriture, un Pain qu’il est lui-même : « Prenez : ceci est mon corps » (Mc 14, 22). Ces deux dons, la place et la nourriture, sont ce qui nous sert pour vivre, ils sont le vivre et le couvert définitifs, et les deux nous sont donnés dans l’Eucharistie.
Là, Jésus nous prépare une place ici-bas parce que l’Eucharistie est le cœur battant de l’Église, elle la génère et la régénère, la rassemble et lui donne la force. Et l’Eucharistie nous prépare aussi une place là-haut, dans l’éternité, parce qu’elle est le Pain du ciel. Ce Pain vient de là, et c’est l’unique matière sur cette terre qui soit vraiment d’éternité. C’est le pain de l’avenir, qui dès maintenant, nous fait goûter déjà un avenir infiniment plus grand que tout ce que nous pouvons attendre de mieux. C’est le pain qui nourrit nos attentes les plus grandes, et il est le gage de la vie éternelle : non seulement une promesse, mais un gage, c’est-à-dire une anticipation concrète de ce qui nous sera donné. L’Eucharistie est la “réservation” du paradis : c’est Jésus, viatique de notre chemin vers cette vie bienheureuse qui ne finira jamais.
Dans l’Hostie consacrée, en plus de la place, Jésus nous prépare l’aliment, la nourriture. Dans la vie nous avons continuellement besoin de nous nourrir, et non seulement d’aliments, mais aussi de projets et d’affections, de désirs et d’espérances. Nous avons faim d’être aimés. Mais les compliments les plus appréciés, les cadeaux les plus beaux et les technologies les plus avancées ne suffisent pas, ne nous rassasient jamais complètement. L’Eucharistie est un aliment simple, comme le pain, mais c’est l’unique qui rassasie, parce qu’il n’y a pas d’amour plus grand. Là nous rencontrons réellement Jésus, nous partageons sa vie, nous sentons son amour. Là, nous pouvons faire l’expérience que sa mort et sa résurrection sont pour nous, et quand nous adorons Jésus dans l’Eucharistie, nous recevons de lui l’Esprit Saint, et nous trouvons paix et joie.
Chers frères et sœurs, choisissons cette nourriture de vie : mettons la messe à la première place, redécouvrons l’adoration dans nos communautés ! Demandons la grâce d’être affamés de Dieu, jamais rassasiés de recevoir ce qu’il prépare pour nous.
Et comme aux disciples d’alors, à nous aussi aujourd’hui, Jésus demande de préparer, et comme les disciples, demandons-lui : « Seigneur où veux-tu que nous allions faire les préparatifs ? ».
Où ? Jésus ne préfère pas certains lieux, et n’en exclut pas d’autres. Il recherche des lieux désertés par l’amour, qui ne sont pas touchés par l’espérance. Dans ces lieux inconfortables, il désire aller, et il nous demande d’y faire les préparatifs. Tant de personnes sont privées d’un lieu digne pour vivre, et de nourriture pour manger ! Et nous connaissons tous des personnes seules, souffrantes, dans le besoin : ce sont des tabernacles abandonnés. Nous qui recevons de Jésus le vivre et le couvert, nous sommes là pour préparer une place et un aliment à ces frères plus faibles. Il s’est fait pain rompu pour nous, et il nous demande de nous donner aux autres, de ne plus vivre pour nous-mêmes, mais les uns pour les autres. On vit alors de façon eucharistique, en répandant dans le monde l’amour que nous prenons de la chair du Seigneur, et l’Eucharistie se traduit dans la vie en passant du “je“ au “tu“.
Les disciples, conclut l’Évangile, « après avoir chanté les psaumes, partirent ». À la fin de la messe, nous serons nous aussi en sortie. Nous marcherons avec Jésus, qui parcourra les rues de cette ville : il désire habiter au milieu de vous, il veut visiter les situations, entrer dans les maisons, offrir sa miséricorde libératrice, bénir, consoler. Le Seigneur veut être proche de nous, ouvrons-lui les portes.

3 juin 2018 Homélie pour la fête du Saint Sacrement à Ostie

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