30 juin 2018

Du Pape François


La vie humaine


La sagesse qui doit inspirer notre attitude à l’égard de “l’écologie humaine” doit considérer la qualité éthique et spirituelle de la vie dans toutes ses phases. Il existe une vie humaine conçue, une vie en gestation, une vie mise au jour, une vie d’enfant, une vie adolescente, une vie adulte, une vie vieillie et consommée - et il existe la vie éternelle.
Il existe une vie qui est au sein de la famille et de la communauté, une vie qui est invocation et espérance, comme il existe aussi la vie humaine fragile et malade, la vie blessée, avilie, marginalisée, rejetée, et c’est toujours la vie humaine : c’est la vie des personnes humaines qui habitent la terre créée par Dieu, et qui partagent la maison qui est commune à toutes les créatures vivantes.
Dans les laboratoires de biologie on étudie la vie avec des instruments qui permettent d’en explorer les aspects physiques, chimiques, et mécaniques, et c’est une étude très importante et incontournable. Mais elle doit être intégrée dans une perspective plus large et plus profonde, attentive à la vie proprement humaine qui fait irruption sur la scène du monde avec le prodige de la parole et de la pensée, des affections et de l’esprit.
Le beau travail de la vie est la génération d’une personne nouvelle, l’éducation de ses qualités spirituelles et créatives, l’initiation à l’amour de la famille et de la communauté, la protection de ses vulnérabilités et de ses blessures, ainsi que l’initiation à la vie d’enfant de Dieu en Jésus Christ.
Quand nous livrons les enfants à la privation, les pauvres à la faim, les persécutés à la guerre, les personnes âgées à l’abandon, ne faisons-nous pas le sale travail de la mort ? Le sale travail de la mort vient du péché, et le mal cherche à nous persuader que la mort est la fin de de toute chose, que nous sommes venus au monde par hazard, et que nous sommes destinés à finir dans le néant.
Eh bien lorsque nous excluons l’autre de notre horizon, la vie se replie sur elle-même et devient un bien de consommation. Se diffuse alors un virus spirituel assez contagieux, qui nous fait devenir homme-miroir et femme-miroir qui se voient seulement eux-mêmes et rien d’autre, nous rend aveugles à la vie et à sa dynamique en tant que don reçu des autres et qui demande d’être mis de façon responsable en circulation pour d’autres.
Une certaine bioéthique part de la maladie et de la mort pour décider du sens de la vie et définir la valeur de la personne. La bioéthique que nous voulons promouvoir part plutôt de la conviction profonde de la dignité irrévocable de la personne humaine - objet de l’amour de Dieu -, dans toute phase et condition de son existence, quelles que puissent être sa vulnérabilité et sa fragilité.
Et dans une vision holistique de la personne, il importe d’articuler les différences concrètes inhérentes à la condition humaine universelle et leur implication étroite avec notre corps. En effet, « notre propre corps nous met en relation directe avec l’environnement et avec les autres êtres vivants. L’acceptation de son propre corps comme don de Dieu est nécessaire pour accueillir et pour accepter le monde tout entier comme don du Père et maison commune, tandis qu’une logique de domination sur son propre corps devient une logique, parfois subtile, de domination sur la création. Apprendre à recevoir son propre corps, à en prendre soin, et à en respecter les significations, est essentiel pour une vraie écologie humaine. La valorisation de son propre corps dans sa féminité ou dans sa masculinité est nécessaire pour pouvoir se reconnaître soi-même dans la rencontre avec celui qui est différent » (Laudato si’, 155).
La culture de la vie doit enfin plus attentivement tourner son regard vers la sérieuse question de sa destination ultime. Il s’agit de mettre en lumière avec une plus grande clarté ce qui oriente l’existence de l’homme vers un horizon qui le dépasse : toute personne est appelée gratuitement « à l’intimité même de Dieu et au partage de son propre bonheur”, dit le Concile Vatican II. La vie de l’homme, belle à enchanter et fragile à mourir, renvoie au-delà d’elle-même - nous sommes infiniment plus que ce que nous pouvons faire par nous-mêmes.
Et la vie de l’homme est par ailleurs incroyablement tenace, et l’homme est même capable - espérant contre toute espérance - de se sacrifier pour elle, jusqu’au bout. À l’amour de la vie au-delà de la mort, Dieu a ouvert l’horizon infini de corps illuminés par l’amour, sans plus aucune larme, qu’il émerveillera éternellement avec l’enchantement toujours nouveau de toutes les choses visibles et invisibles qui sont cachées dans le sein du Créateur.
Merci à vous.

Pape François le 25 juin 2018
aux participants à la 24ème Assemblée générale de l’Académie Pontificale pour la Vie

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