La
vie humaine
La
sagesse qui doit inspirer notre attitude à l’égard de “l’écologie
humaine” doit considérer la qualité éthique et spirituelle
de la vie dans toutes ses phases. Il existe une vie humaine conçue,
une vie en gestation, une vie mise au jour, une vie d’enfant, une
vie adolescente, une vie adulte, une vie vieillie et consommée - et
il existe la vie éternelle.
Il
existe une vie qui est au sein de la famille et de la communauté,
une vie qui est invocation et espérance, comme il existe aussi la
vie humaine fragile et malade, la vie blessée, avilie, marginalisée,
rejetée, et c’est toujours la vie humaine : c’est la vie des
personnes humaines qui habitent la terre créée par Dieu, et qui
partagent la maison qui est commune à toutes les créatures
vivantes.
Dans
les laboratoires de biologie on étudie la vie avec des instruments
qui permettent d’en explorer les aspects physiques, chimiques, et
mécaniques, et c’est une étude très importante et
incontournable. Mais elle doit être intégrée dans une perspective
plus large et plus profonde, attentive à la vie proprement humaine
qui fait irruption sur la scène du monde avec le prodige de la
parole et de la pensée, des affections et de l’esprit.
Le
beau travail de la vie est la génération d’une personne nouvelle,
l’éducation de ses qualités spirituelles et créatives,
l’initiation à l’amour de la famille et de la communauté, la
protection de ses vulnérabilités et de ses blessures, ainsi que
l’initiation à la vie d’enfant de Dieu en Jésus Christ.
Quand
nous livrons les enfants à la privation, les pauvres à la faim, les
persécutés à la guerre, les personnes âgées à l’abandon, ne
faisons-nous pas le sale travail de la mort ? Le
sale travail de la mort vient du péché, et le mal cherche à
nous persuader que la mort est la fin de de toute chose, que nous
sommes venus au monde par hazard, et que nous sommes destinés à
finir dans le néant.
Eh
bien lorsque nous excluons l’autre de notre horizon, la vie se
replie sur elle-même et devient un bien de consommation. Se diffuse
alors un virus spirituel assez contagieux, qui nous fait devenir
homme-miroir et femme-miroir qui se voient seulement eux-mêmes et
rien d’autre, nous rend aveugles à la vie et à sa dynamique en
tant que don reçu des autres et qui demande d’être mis de façon
responsable en circulation pour d’autres.
Une
certaine bioéthique part de la maladie et de la mort pour décider
du sens de la vie et définir la valeur de la personne. La bioéthique
que nous voulons promouvoir part plutôt de la conviction profonde de
la dignité irrévocable de la personne humaine - objet de
l’amour de Dieu -, dans toute phase et condition de son
existence, quelles que puissent être sa vulnérabilité et sa
fragilité.
Et
dans une vision holistique de la personne, il importe
d’articuler les différences concrètes inhérentes à la condition
humaine universelle et leur implication étroite avec notre corps. En
effet, « notre propre corps nous met en relation directe avec
l’environnement et avec les autres êtres vivants. L’acceptation
de son propre corps comme don de Dieu est nécessaire pour accueillir
et pour accepter le monde tout entier comme don du Père et maison
commune, tandis qu’une logique de domination sur son propre corps
devient une logique, parfois subtile, de domination sur la création.
Apprendre à recevoir son propre corps, à en prendre soin, et à en
respecter les significations, est essentiel pour une vraie écologie
humaine. La valorisation de son propre corps dans sa féminité ou
dans sa masculinité est nécessaire pour pouvoir se reconnaître
soi-même dans la rencontre avec celui qui est différent » (Laudato
si’, 155).
La
culture de la vie doit enfin plus attentivement tourner son regard vers la sérieuse question de sa destination ultime. Il
s’agit de mettre en lumière avec une plus grande clarté ce qui
oriente l’existence de l’homme vers un horizon qui le
dépasse : toute personne est appelée gratuitement « à
l’intimité même de Dieu et au partage de son propre bonheur”,
dit le Concile Vatican II. La vie de l’homme, belle à enchanter et
fragile à mourir, renvoie au-delà d’elle-même -
nous sommes infiniment plus que ce que nous pouvons
faire par nous-mêmes.
Et la
vie de l’homme est par ailleurs incroyablement tenace, et l’homme
est même capable - espérant contre toute espérance - de se
sacrifier pour elle, jusqu’au bout. À l’amour de la vie au-delà
de la mort, Dieu a ouvert l’horizon infini de corps illuminés par
l’amour, sans plus aucune larme, qu’il émerveillera
éternellement avec l’enchantement toujours nouveau de toutes les
choses visibles et invisibles qui sont cachées dans le sein du
Créateur.
Merci
à vous.
Pape
François le 25 juin 2018
aux
participants à la 24ème Assemblée générale de l’Académie
Pontificale pour la Vie
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