C’est l’amour qui nous désaltère
Avec les paroles du psaume, nous avons prié : « Ô
Dieu, mon âme a soif de toi. Après toi languit ma chair, terre aride, altérée,
sans eau » (Ps 63, 2). Cette merveilleuse invocation accompagne le
voyage de notre vie, au milieu des déserts que nous sommes appelés à traverser,
et c’est précisément dans cette terre aride que nous parvient une bonne
nouvelle : nous ne sommes pas seuls sur notre chemin. Nos aridités n’ont pas le
pouvoir de rendre notre vie stérile à jamais, notre cri de soif n’est pas
ignoré : Dieu le Père a envoyé son Fils pour nous donner l’eau vive de
l’Esprit Saint, afin de désaltérer notre âme (cf. Jn 4, 10), et
Jésus - nous venons de l’entendre dans l’Évangile - nous montre le chemin pour
être désaltérés. C’est le chemin de l’amour, qu’il a parcouru jusqu’au bout,
jusqu’à la Croix, et sur lequel il nous appelle à le suivre en perdant notre
vie, pour la retrouver à nouveau (cf. Mt 16, 24-25).
Arrêtons-nous ensemble sur ces deux aspects : la
soif qui nous habite, et l’amour qui nous désaltère.
Nous sommes appelés à reconnaître la soif qui
nous habite : le psalmiste crie à Dieu sa soif ardente parce que sa
vie ressemble à un désert. Ses mots ont une résonance particulière dans une
terre comme la Mongolie : un territoire immense, riche d’histoire, une terre
pleine de culture, mais marquée aussi par l’aridité de la steppe et du désert.
Le désert évoqué par le psalmiste se réfère à notre
vie : nous sommes cette terre aride qui a soif d’une eau limpide, d’une eau qui
désaltère en profondeur. Notre cœur aspire à découvrir le secret de la vraie
joie, celle qui, même au milieu des aridités de l’existence, peut nous
accompagner et nous soutenir. Nous portons en nous une soif inextinguible de
bonheur, et surtout nous sommes assoiffés d’amour, car c’est seulement l’amour
qui nous satisfait vraiment, qui nous ouvre à la confiance, en nous faisant
goûter la beauté de la vie.
Chers frères et sœurs, la foi chrétienne répond à
cette soif. Elle la prend au sérieux, elle ne la supprime pas, et elle ne
cherche pas à l’étancher avec des palliatifs ou des substituts, non ! Car notre
grand mystère se trouve dans cette soif : elle nous ouvre au Dieu vivant, au
Dieu Amour qui vient à notre rencontre pour faire de nous ses enfants, et des
frères et sœurs entre nous.
C’est là le deuxième aspect : l’amour qui nous
désaltère. C’est tout le contenu de la foi chrétienne : dans son Fils Jésus,
Dieu qui est amour s’est fait proche de toi, de moi, de nous tous. Il nous
offre l’eau limpide et rafraîchissante, l’eau vive de l’Esprit, qui jaillissant
en nous, nous renouvelle. Cette eau nous est donnée par Jésus, et si nous nous
reconnaissons dans l’assoiffé, nous nous reconnaîtrons aussi dans
le désaltéré, dit saint Augustin. Le Seigneur a pris pitié de notre
infortune, nous dit-il : des prédicateurs de sa parole ont été envoyés par
lui vers nous, il a rempli ses apôtres de l’Esprit Saint, qui est devenu en eux
source d’eau vive, jaillissant en vie éternelle - et telle est bien votre
histoire.
À travers eux,
la Parole nous ramène toujours à l’essentiel de la foi : nous laisser aimer par
Dieu, pour faire de notre vie une offrande d’amour, car seul l’amour nous
désaltère vraiment.
C’est ce que Jésus dit d’un ton fort à l’apôtre Pierre
dans l’Évangile d’aujourd’hui. Celui-ci n’accepte pas que Jésus doive souffrir,
être accusé par les chefs du peuple, passer par la passion et mourir sur la
croix. Pierre réagit, Pierre proteste, il voudrait convaincre Jésus qu’il a
tort… Mais le Seigneur réprimande Pierre, parce que sa façon de penser n’est
pas selon Dieu (cf. Mt 16, 21-23).
Si nous pensons que le succès, le pouvoir, les choses
matérielles, suffisent à étancher la soif ardente de notre vie, c’est une
mentalité mondaine qui ne conduit à rien de bon, et bien plus, nous laisse plus
arides qu’auparavant. Jésus, au contraire, nous montre le chemin : « Si
quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa
croix et qu’il me suive. Car celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui
perd sa vie à cause de moi la trouvera » (Mt 16, 24-25).
Au cœur du christianisme, se trouve cette nouvelle
bouleversante, cette nouvelle extraordinaire : lorsque tu perds ta vie, lorsque
tu l’offres généreusement dans le service, lorsque tu la risques en l’engageant
dans l’amour, lorsque tu en fais un don gratuit pour les autres, alors elle te
revient en abondance, elle répand en toi une joie qui ne passe pas, une paix du
cœur, une force intérieure qui te soutient - et nous avons besoin de paix
intérieure.
C’est la vérité que Jésus nous invite à découvrir, que
Jésus veut révéler à tous, à cette terre de Mongolie : il n’est pas nécessaire
d’être grand, riche ou puissant pour être heureux, non ! Seul l’amour désaltère
notre cœur, seul l’amour guérit nos blessures, seul l’amour nous donne la vraie
joie, et c’est la voie que Jésus a enseignée et ouverte pour nous.
Écoutons donc nous aussi, la parole que le Seigneur
dit à Pierre : « Passe derrière moi » (Mt 16, 23), c’est-à-dire :
deviens mon disciple, fais le même chemin que moi, et ne pense plus selon le
monde. Avec la grâce du Christ et de l’Esprit Saint, nous pourrons alors marcher
sur le chemin de l’amour, même quand aimer signifie renoncer à nous-mêmes,
lutter contre nos égoïsmes, personnels et mondains, prendre le risque de vivre
la fraternité, car lorsque nous perdons notre vie pour l’Évangile, le Seigneur
nous la donne en abondance, pleine d’amour et de joie, pour l’éternité.
Messe du
dimanche 3 septembre 2023 en Mongolie
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.