28 octobre 2023

Du Pape François

 Bâtisseurs de paix dans la vie de tous les jours

 

Aujourd’hui, en fêtant la Toussaint, nous pourrions penser célébrer nos sœurs et frères les saints comme des gens parfaits dans leur vie, toujours linéaires, précis, un peu “amidonnés“. L’Évangile de ce jour dément cette vision stéréotypée, cette sainteté d’image pieuse. En effet, les Béatitudes de Jésus (cf. Mt 5, 1-12), qui sont la carte d’identité des saints, montrent tout l’opposé : elles parlent d’une vie à contre-courant, d’une vie révolutionnaire - les saints sont les vrais révolutionnaires !

Prenons par exemple une béatitude très actuelle : « Heureux les artisans de paix ». Nous voyons alors que la paix de Jésus est très différente de celle que nous imaginons. Nous désirons tous la paix, mais souvent, ce que nous voulons n’est pas vraiment la paix, c’est être en paix, être laissé en paix, ne pas avoir de problèmes, mais la tranquillité.

Jésus en revanche ne dit pas heureux ceux qui sont tranquilles, mais ceux qui font la paix et qui luttent pour faire la paix : les bâtisseurs, les artisans de paix. En effet, la paix se construit, et comme toutes les constructions, elle requiert un effort, une collaboration et de la patience. Nous voudrions que la paix tombe du ciel, mais la Bible parle de la « semence de la paix » (Za 8, 12), parce qu’elle germe sur le terreau de la vie, de la semence de notre cœur. Elle grandit dans le silence, jour après jour, à travers des œuvres de justice et de miséricorde, comme nous le montrent les témoins lumineux que nous fêtons aujourd’hui.

Nous aurions aussi tendance à croire que la paix arrive par la force et la puissance, mais pour Jésus, c’est le contraire. Sa vie et celle des saints nous disent que pour pousser et porter du fruit, la semence de paix doit d’abord mourir. On n’atteint pas la paix en conquérant ou en vainquant quelqu’un, la paix n’est jamais violente, elle n’est jamais armée.

Comment faire alors pour devenir artisans de paix ? Avant tout, il faut désarmer son cœur. Oui, parce que nous sommes tous dotés de pensées agressives, les uns contre les autres, avec des mots tranchants, et nous cherchons à nous défendre avec les fils barbelés de nos plaintes, et les murs en ciment de notre indifférence. Entre plainte et indifférence, nous nous défendons, mais ce n’est pas la paix, c’est la guerre.

La semence de paix demande de démilitariser le champ de notre cœur. Comment va ton cœur ? Est-il démilitarisé, ou bien est-il avec des plaintes et de l’indifférence, avec de l’agression ? Et comment démilitariser son cœur ? En s’ouvrant à Jésus, qui est « notre paix » (Ep 2, 14), en se tenant devant sa Croix, qui est la chaire de la paix, en recevant de lui, dans la confession, « le pardon et la paix ». C’est de là qu’il faut commencer, parce qu’être artisans de paix, être saints, n’est pas notre capacité, c’est un don qu’il nous fait, c’est une grâce.

Frères et sœurs, regardons en nous-mêmes et demandons-nous : Sommes-nous des bâtisseurs de paix ? Là où nous vivons, où nous étudions et où nous travaillons, apportons-nous de la tension, des paroles qui blessent, des commérages qui enveniment, des polémiques qui divisent ? Ou bien ouvrons-nous un chemin de paix ? Pardonnons-nous à ceux qui nous ont offensés, prenons-nous soin de ceux qui sont marginalisés, remédions-nous aux injustices en aidant celui qui a moins ? C’est cela que l’on appelle construire la paix.

On peut se poser toutefois une dernière question, qui vaut pour toutes les béatitudes. Cela vaut-il la peine de vivre ainsi ? N’est-ce pas un choix perdant ? C’est Jésus qui nous donne la réponse : les artisans de paix « seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9). Dans le monde, ils semblent être décalés parce qu’ils ne cèdent pas à la logique du pouvoir et de la domination. Au Ciel, ils seront les plus proches de Dieu, les plus semblables à Lui. Et en réalité, même ici, ceux qui abusent de leur pouvoir restent les mains vides, tandis que celui qui aime chacun et ne blesse personne est vainqueur. Comme le dit le psaume, « il y a pour le pacifique une postérité » (cf. Ps 37, 37).

Que la Vierge Marie, Reine de tous les saints, nous aide à être des bâtisseurs de paix dans la vie de tous les jours.

 

Angélus 1er novembre 2022

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