11 janvier 2015

Du Pape François 09/01/2015

Quand un cœur s’endurcit, c’est qu’il n’aime pas. Soyons dociles à la liberté de l’amour !



     L’Évangile de ce jour (Mc 6, 45-52) nous dit : « Les disciples n’avaient rien compris au sujet des pains : leur cœur était endurci ». Pourtant, c’étaient les apôtres, les plus intimes à Jésus, mais ils ne comprenaient pas. Ils avaient assisté au miracle, ils avaient vu que ces gens - plus de cinq mille personnes ! - avaient été nourris avec cinq pains, et ils n’avaient pas compris. Pourquoi ? Parce que « leur cœur était endurci » !
     Si souvent dans l’Évangile Jésus parle de l’endurcissement du cœur. Il reproche au peuple d’avoir « la nuque raide », il pleure sur Jérusalem qui n’a pas compris qui il était… Le Seigneur est confronté à cette dureté - Jésus doit déployer un tel labeur pour rendre tel cœur plus docile, lui enlever sa dureté, le rendre aimant… Un labeur qui continue après la résurrection, avec les disciples d’Emmaüs et beaucoup d’autres.
     Mais comment un cœur peut-il s’endurcir ? Comment est-ce possible que ces gens qui étaient toujours avec Jésus, tous les jours, qui l’écoutaient, le voyaient… Et leur cœur restait endurci ! Comment un cœur peut-il devenir comme ça ?
     Hier, j’ai posé la question à mon secrétaire : Dis-moi, comment est-ce qu’un cœur s’endurcit ? Il m’a aidé à réfléchir un peu à cette question et un certain nombre de circonstances se sont dégagées - auxquelles chacun peut confronter son expérience personnelle.
     Tout d’abord, le cœur peut s’endurcir suite à une expérience douloureuse, une expérience difficile. C’est la situation de ceux qui ont vécu une expérience très douloureuse, et ils ne veulent pas revivre une aventure semblable. C’est ce qui est arrivé aux disciples d’Emmaüs après la résurrection : C’est trop ! Trop de vacarme ! Éloignons-nous un peu, parce que… - Parce que quoi ? - Eh bien nous espérions que c’était le Messie, et puis non. Je ne veux pas me laisser tromper une autre fois, je ne veux pas me faire d’illusions !
     Ça, c’est le cœur endurci à la suite d’une expérience douloureuse. C’est ce qui arrive aussi à Thomas : Là, non, non ! Je ne crois pas ! Si je ne mets pas mon doigt dans les plaies, je ne croirai pas ! Le cœur des disciples était devenu dur parce qu’ils avaient souffert. Un dicton populaire argentin dit : Si quelqu’un s’est brûlé avec du lait, quand il voit une vache il pleure !... Une expérience douloureuse nous empêche d’ouvrir notre cœur.
     Une autre manière de s’endurcir le cœur, c’est l’enfermement sur soi. Créer un monde en soi-même. Ça arrive quand l’homme est fermé sur lui-même - sur sa communauté ou sur sa paroisse, mais toujours dans une fermeture. Et cette fermeture peut venir de tant de choses : l’orgueil, la suffisance, penser que je suis meilleur que les autres, la vanité… C’est l’homme et la femme qui se promènent avec un miroir, enfermés sur eux-mêmes pour se regarder eux-mêmes, continuellement. On pourrait les définir comme des narcissiques religieux, non ? Ils ont le cœur dur parce qu’ils sont fermés, ils ne sont pas ouverts. Et ils cherchent à se défendre avec ces murs qu’ils construisent autour d’eux. 
     Il y a encore une autre chose qui pousse à s’endurcir le cœur : l’insécurité. C’est ce qu’expérimente celui qui se dit : Je ne me sens pas en sécurité et donc je cherche à m’agripper pour être en sécurité. Cette attitude est typique des gens qui sont tellement attachés à la lettre de la loi. C’est ce qui arrivait aux pharisiens, aux saducéens, aux docteurs de la loi au temps de Jésus. Ils objectaient : Mais la loi dit ceci ! Elle dit qu’on peut aller jusque là - et ils fabriquaient un nouveau commandement. Ils ont fini par faire endosser 300, 400 commandements, et ils se sentaient en sécurité !
     En réalité, tous ces gens sont en sécurité, mais comme est en sécurité un homme ou une femme dans la cellule d’une prison, derrière les barreaux : c’est une sécurité sans liberté. Or c’est justement la liberté que Jésus est venu nous apporter. Saint Paul par exemple a reproché à Jacques, et aussi à Pierre, de manquer à la liberté que Jésus nous a apportée.
     Alors quelle est la réponse à la question initiale : Comment est-ce qu’un cœur s’endurcit ? Eh bien quand un cœur s’endurcit, il n’est pas libre, et s’il n’est pas libre, c’est parce qu’il n’aime pas. C’est exprimé dans la première lecture de la liturgie de ce jour (1 Jn 4, 11-18) : « L’amour parfait chasse la crainte ». « Il n’y a pas de crainte dans l’amour, parce que la crainte implique un châtiment et celui qui reste dans la crainte n’a pas atteint la perfection de l’amour » : il n’est pas libre. Il a toujours peur qu’arrive quelque chose de douloureux, de triste, qui fera mal tourner sa vie ou compromettra son salut éternel. En réalité, ce ne sont que des imaginations, simplement parce que ce cœur n’aime pas ! Le cœur des disciples était endurci parce qu’ils n’avaient pas encore appris à aimer…
     On peut alors poser la question : Qui nous enseignera à aimer ? Qui nous libérera de cette dureté ? Seul l’Esprit Saint peut le faire ! Tu peux suivre mille cours de catéchèse, mille cours de spiritualité, mille cours de yoga, de zen et autre, tout ça ne sera jamais capable de te donner ta liberté de fils ! Seul l’Esprit Saint pousse ton cœur à dire « Père ! ». Lui seul est capable de chasser, de briser cette dureté du cœur et de rendre ce cœur… tendre ? Non, ce mot ne me plaît pas. Mais docile, docile au Seigneur, docile à la liberté de l’amour.
     Ce n’est pas un hasard si le cœur des disciples est resté endurci jusqu’au moment de l’Ascension, quand ils disent au Seigneur : Est-ce maintenant que tu vas faire la révolution et établir ton règne ?... En réalité, ils ne comprenaient rien, et c’est seulement quand l’Esprit Saint est venu que les choses ont changé.
     Demandons donc au Seigneur la grâce d’un cœur docile : que Lui nous sauve de l’esclavage des cœurs endurcis et nous emporte dans cette belle liberté de l’amour parfait, la liberté des fils de Dieu que seul l’Esprit Saint peut donner.

Homélie du vendredi 9 janvier 2015 (1 Jn 4, 11-18 ; Mc 6, 45-52)




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