29 mars 2015

Du Pape François 24/03/2015

Quand nous récriminons, ça nous “défoule“, et ça empoisonne notre âme !



     Dans le passage de l’Évangile de Jean que nous venons de lire, Jésus dit : « Quand vous aurez élevé le Fils de l’homme… ». Il annonce ainsi sa mort sur la Croix, en rappelant le serpent de bronze que Moïse avait dressé pour guérir les israélites dans le désert - c’est ce que rapporte le livre des Nombres que nous venons de lire.
     Le peuple de Dieu, esclave en Égypte, avait été libéré. Ils avaient vraiment vu des miracles, et quand ils avaient eu peur, au moment où ils étaient poursuivis par Pharaon et qu’ils étaient devant la Mer Rouge, ils ont vu le miracle que Dieu avait accompli pour eux. Leur chemin de libération commence donc dans la joie : les israélites étaient contents parce qu’ils étaient libérés de l’esclavage, contents parce qu’ils avaient cette promesse d’une terre très bonne, qui serait pour eux seuls, et parce qu’aucun d’entre eux n’était mort pendant la première partie de leur voyage. Et les femmes étaient contentes parce qu’elles avaient emporté les bijoux des égyptiennes…
     Mais à un certain moment, quand le chemin s’allonge, le peuple ne supporte plus le voyage et se fatigue. Il commence à parler contre Dieu et contre Moïse : « Pourquoi nous avoir fait monter d’Égypte ? Était-ce pour nous faire mourir dans ce désert ? » Ils commencent à récriminer contre Dieu et contre Moïse : « Ici, il n’y a ni pain, ni eau, et nous sommes dégoûtés de cette nourriture misérable, la manne ! » C’est-à-dire que les israélites éprouvaient du dégoût devant l’aide de Dieu, devant un don de Dieu - et la joie initiale de la libération se transforme en tristesse et en murmures.
     Ils préféraient probablement être libérés par un magicien avec sa baguette magique, plutôt que par un Dieu qui les faisait cheminer, et qui d’une certaine manière leur faisait “gagner“ leur salut, ou du moins le mériter un peu.
     L’Écriture nous montre un peuple mécontent, qui fait sortir son mécontentement en récriminant. Comme ça, ils se défoulent, mais ils ne se rendent pas compte que par ce comportement, ils empoisonnent leur âme. Arrivent alors les serpents, parce que de même que ces serpents avaient du venin, ce peuple avait l’âme empoisonnée.
     Jésus aussi parle de ce comportement quand il dit (cf. Mt 11, 17 Lc 7, 32) : Mais qui peut vous comprendre ! « Vous êtes comme ces gamins assis sur une place : nous vous avons joué de la flûte, et vous n'avez pas dansé ! Nous avons entonné un chant funèbre, et vous n'avez pas pleuré ! » N’y a-t-il rien qui vous satisfasse ?... En fait, le problème, ce n’était pas le salut, la libération, parce que ça, tous le voulaient. Le problème, c’était le style de Dieu : la musique de Dieu pour danser ne leur plaisait pas, les chants funèbres de Dieu pour pleurer ne leur plaisaient pas. Alors, que voulaient-ils ? Ils voulaient agir selon leur pensée, choisir leur propre chemin de salut. Mais cette route ne mène nulle part !
     C’est une attitude qu’on rencontre encore aujourd’hui. Même parmi les chrétiens, combien sont un peu empoisonnés par ce mécontentement ! Nous entendons dire : Oui, Dieu est bon, et nous sommes chrétiens, mais… Ce sont ceux qui n’ouvrent pas jusqu’au bout leur cœur au salut de Dieu, et qui mettent constamment des conditions : Oui, oui, oui, je veux être sauvé, mais par tel chemin. Et ainsi, leur cœur s’empoisonne. Ce sont des chrétiens tièdes qui ont toujours quelque chose sur laquelle ils se lamentent : - Pourquoi le Seigneur m’a-t-il fait ça ? – Mais il t’a sauvé, il t’a ouvert la porte, il t’a pardonné tes péchés ! – Oui, oui, c’est vrai, mais… De la même manière, les israélites dans le désert disaient : Je veux de l’eau, du pain, mais celui qui me plaît, pas cette nourriture misérable. Je suis dégoûté ! Et nous aussi, si souvent nous disons que nous sommes dégoûtés par le style de Dieu !…
     Ne pas accepter les dons de Dieu avec le style de Dieu, c’est un péché. C’est un venin qui empoisonne l’âme, qui t’enlève la joie et t’empêche d’avancer.
      Et comment le Seigneur résout-il cela ? Avec le même venin : celui du péché. Il prend sur lui le venin, le péché, et il se laisse “élever“. C’est comme ça qu’il guérit cette tiédeur de l’âme, cette manière d’être chrétien à moitié, d’être des chrétiens “oui, mais…“ La guérison vient seulement en regardant la Croix, en regardant Dieu qui prend sur lui nos péchés. Nos péchés sont là : sur la Croix !
     Tant de chrétiens meurent dans le désert de leur tristesse, de leurs murmures, de leur refus d’accueillir le style de Dieu. Chaque chrétien devrait réfléchir à ça : Dieu nous sauve et nous montre comment il nous sauve, et moi, je ne suis pas capable de supporter un peu un chemin qui ne me plaît pas complètement. C’est cet égoïsme que Jésus a reproché à sa génération qui disait : Jean Baptiste ? C’est un possédé ! Et quand arrive le Fils de l’homme, ils disent alors : C’est un glouton et un ivrogne ! Mais qui peut vous comprendre ?... Moi-même, avec mes caprices spirituels devant le salut que Dieu me donne, qui peut me comprendre ?...
     Gardons-nous des serpents, du venin qui empoisonne le corps du Christ, le venin de tous les péchés du monde, et demandons la grâce d’accepter les moments difficiles, d’accepter le style de Dieu pour nous sauver, d’accepter aussi cette nourriture misérable sur laquelle les hébreux se lamentaient : la grâce ! - c’est-à-dire d’accepter les chemins sur lesquels le Seigneur me fait avancer.
     Que la semaine sainte nous aide à sortir de cette tentation de devenir des chrétiens “oui, mais… »

     Homélie du mardi 24 mars 2015 (Nb 21, 4-9 ; Jn 8, 21-30)





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