Découvrir
ces visages de mères, de pères, de frères que le Seigneur veut
nous donner
«
Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? » (Mt 12, 48).
Par
cette question, Jésus a poussé la multitude qui l’écoutait à se
demander une chose qui peut paraître évidente et certaine : qui
sont les membres de notre famille, ceux qui nous appartiennent et à
qui nous appartenons ?
Laissant
la question avoir un écho en eux, il répond de manière claire et
innovante : « Celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux
cieux, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère » (Mt
12, 50). Il brise ainsi non seulement les déterminismes religieux et
légaux de l’époque, mais aussi toutes les prétentions excessives
de ceux qui pourraient croire avoir des droits ou des privilèges
face à lui. L’Évangile est une invitation et un droit gratuit
pour tous ceux qui veulent écouter.
Il
est surprenant de constater combien l’Évangile est tissé de
questions qui cherchent à réveiller les disciples et à les inviter
à se mettre en chemin pour découvrir cette vérité capable de
donner et de générer la vie, des questions qui visent à ouvrir le
cœur et l’horizon à la rencontre d’une nouveauté beaucoup plus
belle que ce qu’ils peuvent imaginer. Les questions du Maître
visent toujours à renouveler notre vie et celle de notre communauté
à travers une joie sans pareille.
Il
en a été ainsi des premiers missionnaires qui se sont mis en chemin
et qui sont arrivés sur ces terres. En entendant la parole du
Seigneur et en cherchant à répondre à ses questions, ils ont pu
voir qu’ils appartenaient à une famille beaucoup plus grande que
celle créée par les liens du sang, de la culture, de la région ou
de l’appartenance à un groupe déterminé.
Poussés
par la force de l’Esprit, remplis de l’espérance qui naît de la
bonne nouvelle de l’Évangile, ils se sont mis en chemin pour
rencontrer les membres de cette famille, qu’ils ne connaissaient
pas encore. Ils sont allés à la recherche de leurs visages. Il leur
fallait ouvrir le cœur à une nouvelle dimension - sans ces
qualificatifs qui divisent toujours -, pour découvrir tant de
mères et de frères thaï, absents de la table dominicale, et
découvrir non seulement tout ce qu’ils pouvaient leur offrir, mais
aussi tout ce qu’ils avaient besoin de recevoir d’eux afin de
grandir dans la foi et dans la compréhension des Écritures.
Sans
cette rencontre, votre visage aurait manqué au christianisme, les
chants, les danses qui façonnent le sourire thaï si particulier de
ces terres auraient manqué. Ils ont ainsi mieux perçu le dessein
d’amour du Père qui est beaucoup plus grand que tous nos calculs
et prévisions, et ne peut se réduire à une poignée de personnes
ou à un contexte culturel déterminé. Le disciple missionnaire
n’est pas un mercenaire de la foi ni un fabricant de prosélytes,
mais un mendiant qui reconnaît que ses frères, ses sœurs, ses
mères lui manquent, pour célébrer et fêter le don irrévocable de
la réconciliation que Jésus offre à nous tous : le festin est
préparé, allez inviter tous ceux que vous rencontrerez en chemin
(cf. Mt 22, 4.9). Cet envoi est une source de joie, de gratitude et
de bonheur complet parce que « nous permettons à Dieu de nous
conduire au-delà de nous-mêmes pour que nous parvenions à notre
être le plus vrai. Là se trouve la source de l’action
évangélisatrice » (cf. Evangelii Gaudium, n. 8).
Chères
communautés thaïlandaises, continuons le chemin en suivant les
traces des premiers missionnaires, pour rencontrer, découvrir et
reconnaître avec joie tous ces visages de mères, de pères et de
frères que le Seigneur veut nous donner et qui manquent à notre
banquet dominical.
Homélie
de la messe du 21 novembre 2019 à Bangkok
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