Un pont
plutôt qu’un mur…
Je me brise,
mais je ne plie pas, affirme une certaine sagesse populaire. Je me
plie pour ne pas me briser, suggère la sagesse chrétienne :
deux façons de voir la vie.
Hier, en
écoutant la parole de Dieu, nous avons vu ce que fait la jalousie,
ce que fait l’envie dans les familles, dans les communautés
chrétiennes. Ce sont des attitudes négatives qui conduisent
toujours à beaucoup de disputes, de divisions, voire à la haine.
Nous l’avons vu dans le cœur de Saül vis-à-vis de David : il
éprouvait cette jalousie au point qu’il voulait le tuer. Il
ruminait son amertume dans son cœur, il insultait David parce qu’il
croyait qu’il était son ennemi, et l’amertume grandissait dans
son cœur. Malheureusement, ces pensées grandissent toujours lorsque
nous les écoutons à l’intérieur de nous, et elles forment un mur
qui nous éloigne de l’autre personne.
Mais
aujourd’hui, la parole de Dieu nous fait voir une autre attitude :
celle de David. Il savait très bien qu’il était en danger, il
savait que le roi voulait le tuer - et il s’est trouvé dans la
situation de pouvoir tuer le roi : ça aurait été la fin de
l’histoire. Pourtant, il a choisi une autre voie : la voie du
rapprochement. Il choisit de clarifier la situation et de
s’expliquer, la voie du dialogue pour faire la paix.
Pour
dialoguer, la douceur est nécessaire : il ne faut pas crier. Il
est nécessaire aussi de penser que l’autre personne a quelque
chose de plus que moi, et c’est ce que David pensait : Lui est
consacré par le Seigneur, il est plus important que moi. L’humilité,
la douceur… Pour dialoguer, il est nécessaire de faire ce que nous
avons demandé aujourd’hui dans la prière au commencement de la
messe : « se faire tout à tous ». Humilité,
douceur, se faire tout à tous… Et même si ce n’est pas écrit
dans la Bible, nous savons tous aussi que pour pratiquer ces
choses-là, il faut avaler bien des couleuvres… Mais nous devons le
faire, parce que c’est comme ça que la paix se réalise : par
l’humilité, l’humiliation, en cherchant toujours à voir dans
l’autre l’image de Dieu.
Dialoguer
est difficile. Mais il est pire de tenter de construire un pont avec
un adversaire en laissant grandir au fond de soi la rancœur à son
égard. Dans ce cas-là, nous restons isolés, macérant dans le
bouillon amer de notre ressentiment. Un chrétien au contraire a pour
modèle David, qui est victorieux de la haine par un acte d’humilité.
Combien de
problèmes se résolvent par le dialogue, en famille, dans les
communautés, dans les quartiers : Écoute, pardon !
J’avais cru ça… En somme, s’humilier, toujours. S’humilier,
c’est toujours faire un pont, toujours. Et c’est ça être
chrétien. Ce n’est pas facile, non, ce n’est pas facile. Mais
Jésus l’a fait : il s’est humilié jusqu’au bout et il
nous a montré la route.
Et il est
nécessaire de ne pas laisser passer trop de temps : quand le
problème est là, le plus vite possible quand le moment se présente
- une fois l’orage passé -, amorcer le dialogue. Parce que le
temps qui passe fait grandir le mur, comme il fait grandir la
mauvaise herbe qui empêche le bon grain de pousser. Et quand les
murs grandissent, la réconciliation devient tellement difficile,
tellement difficile !
Ce n’est
pas un problème si de temps en temps, les assiettes volent - en
famille, dans les communautés, dans les quartiers… L’important
est de rechercher la paix le plus vite possible par une parole, un
geste. Un pont plutôt qu’un mur - comme ce mur qui pendant tant
d’années a divisé Berlin. Parce que notre cœur aussi peut
devenir comme Berlin et être traversé par un mur qui nous coupe des
autres.
J’ai peur
de ces murs, de ces murs qui grandissent chaque jour un peu plus et
qui favorisent le ressentiment, voire la haine. Pensons au jeune
David : il était en son pouvoir de se venger d’une manière
parfaite. Il était en son pouvoir de se débarrasser du roi, et il a
choisi la voie du dialogue par l’humilité, la clémence, la
douceur.
Aujourd’hui,
pensons à demander à saint François de Sales, Docteur de la
douceur, de nous donner à tous la grâce de bâtir des ponts avec
les autres, et jamais des murs.
Homélie du
vendredi 24 janvier 2014 (1 Sam 24, 3-21 ; Mc 3, 13-19)
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